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Selim Degirmenci

Liberté de manifester en état d’urgence sanitaire : le Conseil d’Etat desserre enfin la nasse ! (CE, 13 juin 2020, req. n° 440846 & décret n° 2020-724 du 14 juin 2020)

« Les manifestations ne sont pas (autorisées) dans les faits car il y a un décret du premier ministre dans le cadre de la deuxième phase du déconfinement qui interdit les rassemblements de plus de dix personnes. Mais je crois que l'émotion mondiale, qui est une émotion saine sur ce sujet, dépasse au fond les règles juridiques qui s'appliquent », déclarait le ministre de l’intérieur le 9 juin dernier, au sujet des manifestations ayant vu le jour après la mort de Georges Floyd et dénonçant la xénophobie et les abus commis par certains policiers ou gendarmes dans l’emploi de la force publique. Si la référence faite par Christophe Castaner à une « émotion saine » a pu prêter le flanc à la critique ou au sarcasme, les rassemblements et réunions n’ont cessé, eux, de faire l’objet d’un strict encadrement, et ce aussi bien durant la période du confinement (17 mars - 11 mai) [...]
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Déconfinement et liberté du culte : de l’impossibilité d’une interdiction générale et absolue à la nécessité d’un encadrement des rassemblements de fidèles dans les lieux de culte (CE, ord., 11 mai 2020, n° 440366 & décret n° 2020-618 du 22 mai 2020)

Si la France s’est officiellement « déconfinée » à compter du 11 mai 2020, des îlots restreignant différentes libertés fondamentales continuent ou ont continué de perdurer dans le cadre de la stratégie définie par l’exécutif aux fins de lutter contre l'épidémie de covid-19 sous l'empire de l'état d'urgence sanitaire. Il en va ainsi de l’interdiction pour les établissements de culte, qui s’ils ont été autorisés à rester ouverts depuis le 24 mars 2020, se sont vus interdire en leur sein la tenue de tout rassemblement ou réunion, à l’exception toutefois des cérémonies funéraires dans la limite de 20 personnes – et ceci y compris après la levée du confinement le 11 mai dernier (voir les décrets – successivement applicables – n° 2020-293 du 23 mars 2020, n° 2020-545 et n° 2020-548 du 11 mai 2020[1]). C’est cette interdiction – posée, en dernier lieu, par l’article 10 III du décret n° 2020-548 du [...]
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Retour sur la décision du Conseil constitutionnel n° 2020-800 DC du 11 mai 2020 (3ème partie)

--------------------- La censure des dispositions relatives aux mesures de mise en quarantaine et de placement en isolement « ancien régime »  --------------------- La loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 était particulièrement légère sur l’encadrement des mesures d’isolement et de mise en quarantaine prononcées dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire à l’encontre de personnes respectivement malades/contaminées ou de personnes suspectées de l’être. En dépit d’une telle carence, l’article 13 de la loi du 11 mai 2020 avait pour effet de laisser subsister, à compter de son entrée en vigueur et au plus tard jusqu’au 1er juin 2020 – échéance avant laquelle est censé intervenir un décret fixant les conditions d’application du II de l’article L. 3131-17 relatif aux mesures individuelles de quarantaine et d’isolement prononcées par décision individuelle motivée du préfet – le régime juridique issu de la loi du 23 mars 2020 (« ancien régime »). Cette survivance de l’ « ancien régime »  a [...]
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Retour sur la décision du Conseil constitutionnel n° 2020-800 DC du 11 mai 2020 (1ère partie)

Entrée en vigueur le jour même de sa promulgation, la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 vient, comme l’indique son intitulé, d’une part proroger l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet 2020 inclus (article 1er) – et non jusqu’au 23 juillet comme cela avait été initialement envisagé – et d’autre part compléter et actualiser les dispositions de ce régime exorbitant introduit par le titre 1er de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19. Ce régime va donc continuer de s’appliquer et de servir de base légale à l’ensemble des mesures prises sur son fondement jusqu’au 10 juillet 2020 sauf à ce que l’exécutif décide d’y mettre fin, de façon anticipée, « après avis du comité de scientifiques prévu à l’article L. 3131-19 » du Code de la santé publique (article 2). Cette loi vise – avec le décret n° 2020-548 du 11 mai [...]
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Retour sur la décision du Conseil constitutionnel n° 2020-800 DC du 11 mai 2020 (2ème partie)

--------------------- La validation de certaines prérogatives reconnues au Premier ministre en matière de transports et déplacements, établissements recevant du public, lieux de réunion et enfin de réquisition (art. L. 3131-15 du CSP) --------------------- La loi du 11 mai 2020 est venue préciser et compléter la rédaction de certaines catégories de mesures, prévues par le titre 1er de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020, que le Premier ministre est, en application de l’article L. 3131-15 du CSP, habilité à prendre « aux seules fin de garantir la santé publique » dans les circonscriptions territoriales où l’état d’urgence sanitaire a été déclaré. Les prérogatives énumérées ci-après, reconnues à l’autorité gouvernementale, ont été contestées au motif qu’elles seraient susceptibles de porter atteinte notamment à la liberté personnelle, la liberté d’aller et de venir, le droit au respect de la vie privée ou encore à la liberté d’entreprendre : réglementation ou interdiction de la circulation [...]
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Sur le décret « miroir » du 11 mai 2020 (décret n° 2020-548)

Le quitus délivré par le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2020-800 DC du 11 mai 2020, aux dispositions de l'article L. 3131-15 I. 1° du Code de la santé publique (CSP) habilitant le Premier ministre à réglementer ou interdire la circulation des personnes et des véhicules et réglementer l'accès aux moyens de transport et les conditions de leur usage, a permis de conforter l’action réglementaire déployée par le Gouvernement à compter du 11 mai 2020 dans le cadre de la mise en œuvre de la nouvelle phase de lutte contre la pandémie, qui succède à la phase initiale de confinement général et indifférencié de la population. C’est dans ce contexte que le Premier ministre a ainsi le 11 mai 2020 : - pris un nouveau décret, le décret n° 2020-548 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, publié au JO du [...]
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Le jour du déconfinement est arrivé ! (à propos du décret n° 2020-545 du 11 mai 2020)

Ca y est, nous y sommes ! Par un décret publié ce jour au JO, le Premier ministre vient décliner, sur le plan réglementaire, les modalités précises de la reprise de la vie de la Nation présentées lors d’une conférence de presse le 7 mai dernier, à savoir notamment la fin de la mesure de confinement généralisé prévue par l’article 3 du décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 ayant pris le relais du décret n° 2020-260 du 16 mars 2020. Concomitamment ce décret procède à la division du territoire national en deux zones – verte et rouge – dans lesquelles les activités sociales, scolaires, sportives et commerciales pourront faire l’objet de réglementations distinctes au regard « de [la] situation sanitaire, déterminée notamment en fonction du nombre de passage aux urgences pour suspicion d'affection au covid-19, du taux d'occupation des lits de réanimation par des patients atteints par le covid-19 et de [...]
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Le Conseil d’Etat recadre l’Intérieur qui « se sentait pousser des ailes » en voulant interdire la bicyclette (CE, ord., 30 avril 2020, n° 440179 ; à lire en fredonnant la chanson d’Yves Montand !)

« La loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société. Tout ce qui n'est pas défendu par la loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas » ainsi que l’affirme solennellement la Déclaration de 1789, y compris lorsque l’objet de l’empêchement allégué consiste en la pratique de la bicyclette. C’est ce qu’en définitive le juge des référés du Conseil d’Etat a décidé en considérant que « la faculté de se déplacer en utilisant un moyen de locomotion dont l’usage est autorisé constitue, au titre de la liberté d’aller et venir et du droit de chacun au respect de sa liberté personnelle, une liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative ». Les mesures sollicitées par l’association requérante La Haute juridiction administrative était saisie par la Fédération Française des Usagers de la Bicyclette (FFUB) afin [...]
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