CE, 9 décembre 2016, Commune de Grasse et Société Foncière Europe, n° 391840
Par une décision du 9 décembre 2016, qui sera mentionnée aux tables du recueil Lebon, le Conseil d’Etat vient de préciser les modalités d’évaluation des concessions réciproques effectuées dans le cadre d’un protocole transactionnel intervenant pour mettre un terme au litige indemnitaire lié à la rupture des relations contractuelles et l’absence de signature d’un contrat avec une personne publique.
A cette occasion, le Conseil d’Etat a rappelé que, pour déterminer si une transaction constitue une libéralité consentie de façon illicite par une collectivité publique, les concessions réciproques consenties par les parties dans le cadre de cette transaction doivent être appréciées de manière globale, et non en recherchant si, pour chaque chef de préjudice pris isolément, les indemnités négociées ne sont pas manifestement disproportionnées.
Ceci posé, il relève que si la rupture unilatérale, par la personne publique, pour un motif d’intérêt général, des négociations préalables à la passation d’un contrat n’est pas de nature à engager sa responsabilité pour faute, « cette responsabilité peut, toutefois, être mise en cause lorsque la personne publique, au cours des négociations, a incité son partenaire à engager des dépenses en lui donnant, à tort, l’assurance qu’un tel contrat serait signé, sous réserve que ce dernier n’ait pu légitimement ignorer le risque auquel il s’exposait ». Mais à supposer qu’une telle assurance ait été donnée, elle ne pourrait néanmoins « créer aucun droit à la conclusion du contrat ». De sorte que « la perte du bénéfice que le partenaire pressenti escomptait de l’opération ne saurait, dans cette hypothèse, constituer un préjudice indemnisable ».
Par conséquent, réglant ensuite l’affaire au fond, le Conseil d’Etat juge que, « dans les circonstances de l’espèce, compte tenu de l’octroi à la société Foncière Europe d’une somme de 300 000 euros au titre de son manque à gagner, chef de préjudice non indemnisable, et de ce que […] le montant de 450 000 euros prévu au titre des pertes subies n’est pas sous-évalué, la transaction […] doit être regardée comme comportant, dans son ensemble, des concessions manifestement disproportionnées et donc comme constitutive d’une libéralité » de la part de la personne publique.