Concours : taille physique minimale et discrimination envers les femmes
CJUE, 18 octobre 2017, Affaire C-409/16 Ypourgos Esoterikon et Ypourgos Ethnikis Paideias Kai Thriskevmaton contre Maria-Eleni Kalliri
A l’occasion d’un renvoi préjudiciel, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a jugé, le 18 octobre dernier, que constitue une discrimination indirecte le fait d’imposer, pour l’accès à une école de police, un critère de taille minimale indépendant du sexe :
« En l’occurrence, la juridiction de renvoi a constaté elle-même dans sa décision qu’un nombre beaucoup plus élevé de femmes que d’hommes ont une taille inférieure à 1,70 m, de telle sorte que, en application de cette réglementation, celles-ci seraient très nettement désavantagées par rapport à ces derniers en ce qui concerne l’admission au concours d’entrée aux écoles des officiers et agents de la police hellénique. Il s’ensuit que la réglementation en cause au principal crée une discrimination indirecte. »
S’agissant ensuite de l’éventuelle justification par un but légitime de cette discrimination et du caractère nécessaire et approprié des moyens pour y parvenir, la CJUE a ajouté :
« 38. À cet égard, s’il est vrai que l’exercice de fonctions de police concernant la protection des personnes et des biens, l’arrestation et la surveillance des auteurs de faits délictueux ainsi que les patrouilles préventives peut exiger l’utilisation de la force physique et impliquer une aptitude physique particulière, il n’en demeure pas moins que certaines fonctions de police, telles que l’assistance aux citoyens ou la régulation de la circulation, ne nécessitent apparemment pas un engagement physique important (voir, en ce sens, arrêt du 13 novembre 2014, Vital Pérez, C‑416/13, EU:C:2014:2371, points 39 et 40).
39 Par ailleurs, à supposer que la totalité des fonctions exercées par la police hellénique requière une aptitude physique particulière, il n’apparaît pas qu’une telle aptitude soit nécessairement liée à la possession d’une taille physique minimale et que les personnes d’une taille inférieure en soient naturellement dépourvues.
40 Dans ce contexte, il peut notamment être tenu compte du fait que, jusqu’à l’année 2003, la réglementation grecque exigeait, aux fins de l’admission au concours d’entrée aux écoles des officiers et agents de la police hellénique, des tailles minimales différentes pour les hommes et pour les femmes, puisque, concernant ces dernières, la taille minimale requise était fixée à 1,65 m, au lieu de 1,70 m pour les hommes.
41 Les circonstances, évoquées par Mme Kalliri, que, s’agissant des forces armées, de la police portuaire et de la garde côtière grecques, des tailles minimales différentes sont exigées pour les hommes et pour les femmes et que, en ce qui concerne ces dernières, la taille minimale est de 1,60 m apparaissent également pertinentes.
42 En tout état de cause, l’objectif poursuivi par la réglementation en cause au principal pourrait être atteint par des mesures moins désavantageuses pour les personnes de sexe féminin, telles qu’une présélection des candidats au concours d’entrée aux écoles des officiers et agents de police fondée sur des épreuves spécifiques permettant de vérifier leurs capacités physiques.
43 Il en résulte que, sous réserve des vérifications qu’il appartient à la juridiction de renvoi d’effectuer, ladite réglementation n’est pas justifiée. »