Contentieux : la jonction des requêtes est sans effet sur l’application des règles de notification
Le Conseil d’Etat a jugé dans un arrêt du 20 décembre 2022 à mentionner aux tables du recueil Lebon (req. n°450472), que « La jonction des requêtes qu’est susceptible d’opérer une juridiction est sans effet sur l’application des règles de notification de ses décisions, lesquelles peuvent en particulier différer selon ses modes de saisine ».
En l’espèce, M. A avait saisi le tribunal administratif de Marseille de deux demandes distinctes :
-la première, présentée par le ministère d’un avocat
-et la seconde présentée, sans recourir au ministère d’un avocat, par le moyen du téléservice dénommé « Télérecours citoyens ».
Par un unique jugement du 13 janvier 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ces deux demandes après les avoir jointes.
M. A. se pourvoit en cassation contre l’ordonnance du 13 janvier 2020 par laquelle le premier vice-président de la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté pour tardiveté l’appel qu’il avait formé contre ce jugement.
Aux termes du premier alinéa de l’article R. 751-3 du Code de justice administrative : « Sauf disposition contraire, les décisions sont notifiées le même jour à toutes les parties en cause et adressées à leur domicile réel, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, sans préjudice du droit des parties de faire signifier ces décisions par acte d’huissier de justice ».
Par dérogation à ce principe, les deux premiers alinéas de l’article R. 751-4-1 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, disposent que « Par dérogation aux articles R. 751-2, R. 751-3 et R. 751-4, la décision peut être notifiée par le moyen de l’application informatique mentionnée à l’article R. 414-1 aux parties qui sont inscrites dans cette application ou du téléservice mentionné à l’article R. 414-6 aux parties qui en ont accepté l’usage pour l’instance considérée.
Ces parties sont réputées avoir reçu la notification à la date de première consultation de la décision, certifiée par l’accusé de réception délivré par l’application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de deux jours ouvrés à compter de la date de mise à disposition de la décision dans l’application, à l’issue de ce délai. Sauf demande contraire de leur part, les parties sont alertées de la notification par un message électronique envoyé à l’adresse choisie par elles ».
Pour rejeter comme tardive la requête de M. A, enregistrée le 23 novembre 2020 au greffe de la cour administrative d’appel de Marseille, « l’ordonnance attaquée se fonde sur la circonstance que la notification du jugement du tribunal administratif, accompagnée de l’indication des voies et délais de recours, a été mise à disposition de M. A… le 15 janvier 2020 dans l’application « Télérecours citoyens » et que ce dernier devait être réputé en avoir reçu notification régulière au plus tard deux jours ouvrés à compter de cette mise à disposition ».
Toutefois, pour le Conseil d’Etat la jonction des requêtes est sans effet sur l’application des règles de notifications des décisions.
Ainsi, « la mise à disposition de M. A., dans le téléservice « Télérecours citoyens », du jugement du tribunal administratif rejetant ses deux demandes, était [en effet], en application de l’article R. 751-4-1 du code de justice administrative, de nature à faire courir à son égard le délai d’appel contre ce jugement en tant qu’il rejette la demande qu’il avait introduite sans ministère d’avocat par l’intermédiaire de ce téléservice« .
Mais « il n’en va pas de même en ce qui concerne le rejet de son autre demande formée par ministère d’avocat« .
S’agissant de cette requête, « le délai d’appel n’a commencé à courir, en application des dispositions de l’article R. 751-3 du code de justice administrative, qu’à compter de la notification du jugement faite au domicile réel du requérant par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ».
Dès lors, l’ordonnance du premier vice-président de la cour administrative d’appel de Marseille a été annulée, en tant qu’elle a rejeté pour tardiveté, l’appel contre le jugement sur l’une des requêtes initiales.