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Droit de préemption urbain, vente amiable et commission d’agence

Droit de préemption urbain, vente amiable et commission d’agence

Dans quelle mesure le titulaire du droit de préemption urbain (DPU) est-il tenu de régler la commission de l’agent immobilier en cas d’acquisition à l’amiable d’un bien initialement proposé dans le cadre d’une DIA ?

Une récente décision de la Cour de cassation, qui clôt un dossier suivi par le Cabinet pendant plusieurs années, est l’occasion de rappeler le droit positif : le droit de commission de l’agent immobilier – qui doit être mentionné dans la DIA (Cass., 3ème civ., 26 septembre 2007, pourvoi n° 06-17.337) – n’est reconnu que s’il y a eu effectivement préemption.

Pour la Cour de cassation (Cass., 1ère civ, 24 janvier 2006, Atlant’Immo, n°02-18746), « la substitution du préempteur à l’acquéreur ne porte pas atteinte au droit à commission de l’agent immobilier » ; dans ces conditions, la contre-proposition faite par le titulaire du droit de préemption, acceptée par le vendeur, ne crée « pas un nouvel accord exclusif de tout lien de droit avec l’acte pour lequel l’agent immobilier avait prêté son entremise ».

Mais cette solution n’est pas applicable lorsque le vendeur renonce à la vente de son bien, en application des dispositions de l’article R. 213-10 du Code de l’urbanisme, pour ensuite proposer directement le bien concerné au titulaire du droit de préemption urbain.

Dans cette hypothèse, l’on se situe en dehors du cadre posé par le Code de l’urbanisme, et donc en dehors du champ d’application de la jurisprudence Atlant’Immo précitée.

Par exemple, la Cour d’appel d’AMIENS a jugé que :

« pour appliquer la règle selon laquelle la substitution du préempteur à l’acquéreur ne porte pas atteinte au droit de commission de l’agent immobilier tel qu’il a été conventionnellement prévu lorsque ce droit a été mentionné dans la déclaration d’intention d’aliéner comme en l’espèce, encore faut-il qu’il y ait eu préemption ; tel n’est pas le cas en l’espèce puisque le silence du vendeur dans les deux mois de la notification de l’Agglomération de la région de Compiègne de sa décision d’exercer son droit de préemption à un prix inférieur à celui de la vente projetée , vaut renonciation par le vendeur à la vente en application de l’article R. 213-10 du Code de l’urbanisme ;

 qu’ainsi l’opération n’a pas été conclue par substitution de l’Agglomération de la région de Compiègne à la SCI Saint Phony, comme le soutient la SARL Bernice Immobilier, mais dans le cadre d’une vente amiable que la SCI Coccinelle et l’Agglomération de la région de Compiègne ont directement conclu, vente qui est sans lien juridique avec la promesse de vente conclue par l’entremise de la SARL Bernice Immobilier » (CA Amiens, 4 novembre 2010, Agglomération de la région de Compiègne c/ SARL Bernice, n° 09-01713 ; confirmé par Cass. 1ère civ., 13 décembre 2012, SARL Bernice Immobilier, n°11-11533).

Ces principes avaient été appliqués par le Tribunal de grande instance des Sables d’Olonnes, puis la Cour d’appel de Poitiers (1ère ch. Civile, 7 novembre 2017), successivement saisis par un agent immobilier estimant qu’une vente amiable conclue entre une Commune et un vendeur, après une procédure de droit de préemption urbain, l’avait été au mépris de ses droits.

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par l’agence immobilière (Cass. Civ.1, 13 mars 2019, pourvoi n° Y-12.605 ; décision jointe), en considérant :

« mais attendu, d’abord, qu’ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que, lors de l’exercice du droit de préemption, son titulaire n’était tenu de payer les commissions de l’intermédiaire qu’en cas de transfert effectif de la propriété du bien et que M. X avait renoncé à la vente, de sorte que le droit à commission de l’agent immobilier était éteint au regard de la vente initiale à défaut de substitution à l’acquéreur, la cour d’appel en a exactement déduit que la vente de gré à gré, intervenue après la période pendant laquelle M. X ne pouvait pas traiter avec la commune, n’ouvrait pas droit à rémunération pour l’agent immobilier ».

Les deux autres branches du moyen de cassation fondés sur la dénaturation du contrat de mandat souscrit entre le vendeur et l’agence immobilière et sur l’existence de manœuvres dolosives entre le vendeur et la Commune n’ont pas plus prospéré.

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