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Gérer la procédure de péril d’immeubles menaçant ruine

Gérer la procédure de péril d’immeubles menaçant ruine

Sécurité publique : La police spéciale des édifices menaçant ruine peut prescrire la réparation ou la démolition des immeubles qui créent un risque pour La sécurité publique. Mesures provisoires : En cas de danger immédiat, une procédure d’urgence de « péril imminent», distincte de celle de «péril ordinaire», permet d’édicter rapidement des mesures provisoires. Police du Maire : Lorsque le danger ne provient pas, à titre prépondérant, d’une cause inhérente à l’immeuble, Le maire intervient au titre de la police générale.

01 – Connaître les polices applicables aux immeubles menaçant ruine. 

La procédure de péril ne peut être action-née qu’en cas de danger pour la sécurité publique, émanant d’un immeuble bâti. Elle ne vise donc que les immeubles (qui peuvent d’ailleurs appartenir à une per-sonne publique, mais non à la commune, le maire ne pouvant s’adresser d’injonctions) , entendus comme les édifices bâtis et les éléments qui peuvent y être incorporés (balcon, corniche…). La procédure de péril doit être distinguée de celle de déclaration en état d’abandon manifeste, prévue par les articles L.2243-1 et suivants du code général des collectivités territoriales (CGCT). Il s’agit d’une police spéciale, qui permet de prescrire la répa-ration ou la démolition des immeubles qui n’offrent pas les garanties de solidité néces-saires au maintien de la sécurité publique. Ce pouvoir de police spéciale s’exerce dans le cadre de procédures distinctes, selon que le péril est «ordinaire», c’est-à-dire réel et sérieux mais pas immédiat, ou «imminent». En application des disposi-tians de l’article L. 5211-9-2 du CGCT, cette police spéciale, compétence traditionnelle du maire, est transférée au président de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre com-pétent en matière d’habitat, sauf décision d’opposition à ce transfert de la part des maires des communes membres pour ce qui concerne le territoire de leur commune, ou de la décision de renonciation à ce transfert par le président de l’EPCI pour l’ensemble du territoire couvert par I’EPCI. En revanche, lorsque le danger émane d’une cause extérieure à l’état de l’im-meuble telle quhane inonda-tion ou une chute d’arbre, le maire doit également agir, mais cette fois, au titre de la police générale. La ligne de partage entre police spéciale et police géné-rale s’efface toutefois en cas d’extrême urgence: le maire est alors fondé à user de ses pouvoirs de police générale pour pres-crire l’exécution des mesures nécessaires pour assurer la sécurité publique.

02 – Maîtriser la procédure de péril ordinaire. 

La procédure de péril dite «ordinaire», qui permet d’imposer à un propriétaire la réa-lisation de travaux, parfois très lourds, est très formalisée. A l’inverse de la procédure de péril imminent, la procédure de péril ordinaire se caractérise par l’édiction d’un arrêté, sans expertise préalable, mais après une phase contradictoire. Concrètement, l’autorité compétente doit prendre l’attache du propriétaire et des titulaires de droits réels immobiliers — tels qu’ils apparaissent au fichier immobilier pour leur faire part des désordres consta-tés, pièces à l’appui, et les inviter à présen-ter des observations dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois. Lorsque l’immeuble concerné ou ses abords sont protégés au titre du code du patrimoine ou du code de l’environnement, l’architecte des Bâtiments de France (ABF) est consulté. Ces formalités effectuées, l’autorité compétente, par un arrêté de péril motivé, met en demeure le propriétaire de procéder, dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois, à la réparation ou à la démolition de l’immeuble. L’arrêté pourra être assorti d’une interdiction temporaire ou définitive d’habiter ou d’utiliser l’im-meuble (le propriétaire étant alors en prin-cipe tenu d’assurer le relogement des occu-pants) et préciser le montant de l’astreinte auquel s’expose le propriétaire en cas d’inexécution des mesures prescrites dans le délai déterminé. En cas d’exécution, l’auto-rité compétente, après avoir sollicité l’avis d’un homme de l’art, prend acte des tra-vaux et de leur date d’achè-vement, prononce la main-levée de l’arrêté de péril et, le cas échéant, de l’interdic-tion d’habiter ou d’utiliser les lieux. Inversement, en cas de carence dans le délai imparti, une mise en demeure est adressée au propriétaire qui dispose d’un nouveau délai, d’une durée minimum d’un mois.

A noter : « La procédure de péril doit être distinguée de la procédure de déclaration en état d’abandon manifeste, prévue par les articles L.2243-1 et suivants du code général des collectivités territoriales »

03 – Déclencher la procédure de péril imminent. 

En cas de péril imminent, une procédure spécifique permet à l’autorité compétente d’édicter rapidement des mesures provi-soires. Après avoir simplement «averti» le propriétaire, l’autorité compétente solli-cite du tribunal administratifcompétent la désignation d’un expert qui devra, dans les 24 heures de sa nomination, se prononcer sur l’état des bâtiments concernés par le péril et proposer des mesures de nature à mettre fin à l’imminence du péril. Le cas échéant, l’ABF est informé. Au vu du rapport d’expertise constatant l’urgence et le péril, l’autorité compétente ordonne les mesures nécessaires pour garantir la sécurité de l’immeuble (notam-ment son évacuation), qui ne peuvent être que provisoires. La prescription de travaux excédant la seule consolidation de l’im-meuble — et pouvant allerjusqu’à la démo-lition du bien — ne peut en principe inter-venir que dans le cadre de la procédure ordinaire, qui prévoit des garanties renfor-cées au profit des propriétaires. En pratique, il est probable que les mesures provisoires conjurent I’imminence du danger mais elles ne mettent p our autant pas fin durablement au péril. Dans ce cas, il est impératifde poursuivre la procédure de péril imminent par une procédure de péril ordinaire, prévue par le code de la construction et de l’habitation, qui impose notamment une phase contradictoire, absente de la procédure de péril imminent.

04 – S’adapter aux spécificités d’un immeuble en copropriété.

Si les désordres constatés concernent les parties communes d’un immeuble en copropriété, la procédure de péril ordinaire comprend certaines spécificités. L’interlo-cuteur de la commune devient le syndicat des copropriétaires, pris en la personne du syndic, qui se charge de transmettre l’in-formation relative aux désordres constatés aux copropriétaires. Le délai imparti pour présenter les observations est majoré, pas-sant d’un à deux mois. Lorsque l’inexécution des travaux pres-crits résulte de la défaillance de certains des copropriétaires, le maire, informé par le syndic, peut, par une décision motivée, se substituer aux propriétaires qui n’ont pas répondu aux appels de fonds destinés à financer les travaux prescrits. Cette décision est notifiée au syndic ainsi qu’aux copropriétaires défaillants, auxquels sont détaillées les sommes versées pour leur compte, qui seront in fine recouvrées par la commune, le cas échéant, augmen-tées des intérêts moratoires courant à compter de la décision de substitution du maire. Il appartient en principe au syndic d’avertir la commune qui n’aurait pas récu-péré la totalité de sa créanee qu’elle détient sur un copropriétaire défaillant, en cas de mutation de son lot.

05 – Optimiser la procédure de péril. 

Afin d’optimiser l’intervention communale, l’arrêté de péril — et le cas échéant, l’arrêté de mainlevée — peut être publié au fichier immobilier, à la demande du maire et aux frais du propriétaire. L’arrêté de péril est également transmis au préfet, au titre du contrôle de légalité, au président de l’EPCI compétent en matière d’habitat, aux organismes payeurs des aides personnelles au logement et au gestionnaire du fonds de solidarité pour le logement du département, à tout le moins lorsque le bâtiment menaçant ruine est à usage total ou partiel d’habitation.

06 – Assurer l’exécution d’office des travaux prescrits par l’arrêté de péril. 

Lorsque les mesures prescrites par l’arrêté de péril n’ont pas été exécutées dans les délais impartis — ce qui expose le proprié-taire à des poursuites pénales — l’autorité compétente peut faire réaliser, sans recours préalable aujuge, les travaux d’office, aux frais du propriétaire défaillant. Il s’agit, certes, au moins en théorie, d’une simple faculté; mais, eu égard à l’obligation d’agir, il est, en droit comme en fait, impé-ratif d’intervenir en cas de défaillance des propriétaires. Mieux vaut, en effet, engager les travaux nécessaires pour garantir la sécurité publique, puis se retourner contre les propriétaires défaillants que de devoir justifier de l’inaction de la commune en cas d’aggravation de la situation (écroule-ment de l’immeuble, notamment) dans le cadre d’un contentieux, au mieux adminis-tratif (action en responsabilité pour carence fautive notamment) ou, pire, pénal. L’auto-rité compétente ne peut toutefois pas faire procéder à la démolition de l’immeuble prescrite sans avoir au préalable obtenu du juge judiciaire statuant en la forme des référés l’autorisation d’y procéder. De la même manière, en cas d’hostilité déclarée du propriétaire ou des occupants à la réalisation des travaux (refus de laisser entrer dans les lieux, par exemple), la pru-dence recommande de saisir préalablement le juge, afin d’y être autorisé.

07 – Garantir le recouvrement du montant des travaux ordonnés d’office. 

Quelle que soit la procédure de péril sui-vie, les frais éventuellement avancés par la personne publique pour mettre en sécurité l’immeuble sont à la charge du proprié-taire. Concrètement, en cas d’exécution d’office des travaux prescrits, la créance de la commune comprendra le montant des travaux destinés à assurer la sécurité de l’ouvrage ou celle des bâtiments mitoyens, les frais exposés par la commune agissant en qualité de maître d’ouvrage public et, le cas échéant, la rémunération de l’expert nommé par le juge administratif. Le recouvrement des frais de toute nature avancés parla commune qui s’est substituée aux propriétaires ou copropriétaires défaillants se fait comme en matière de contributions directes, c’est-à-dire en émet-tant directement un titre exécutoire. Le recouvrement de la créance pourra, en outre, être facilité par l’inscription d’un privilège spécial immobilier. Les conséquences financières diffèrent lorsque le maire est intervenu en situation d’extrême urgence créant un péril particu-lièrement grave et imminent, sur le fonde-ment de ses pouvoirs de police générale. Dans ce cas, les dépenses exposées pour remédier au danger sont à la charge de la commune, cette dernière disposant toute-fois d’une action récursoire contre le pro-priétaire devant le juge judiciaire.

Références : 

  • Code général des collectivités territoriales, articles L.2212-1, L.2212-2, L.2214-4 et L.5211-9-2.
  • Code de la construction et de l’habitation, art. L.511-1 et suivants, ainsi que R.511-1 et suivants.

Charline HATINGUAIS

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