Impartialité : le magistrat désigné comme médiateur ne peut pas conclure comme rapporteur public dans la même affaire
Dans une décision du 29 décembre 2022 (n°459673), à mentionner aux tables du recueil Lebon, le Conseil d’Etat a jugé que « le principe d’impartialité s’oppose à ce qu’un magistrat administratif choisi ou désigné comme médiateur […] participe à la formation de jugement chargée de trancher le différend soumis à la médiation ou conclue comme rapporteur public sur celui-ci. »
En l’espèce, la province Nord de Nouvelle-Calédonie a conclu un marché de gré à gré avec une société pour la réalisation de travaux de dragage et d’évacuation de la rivière Kouaoua et de création d’un chenal. La province Nord a refusé de réceptionner ces travaux.
Après qu’une médiation a été ordonnée, laquelle n’a pas aboutit à un accord entre les parties, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a prononcé la réception définitive des travaux et a condamné la province Nord au paiement du solde du marché.
Saisie par la province Nord, la Cour administrative d’appel de Paris a annulé la décision du tribunal administratif « au motif qu’un magistrat de ce tribunal avait exercé successivement les fonctions de médiateur et de rapporteur public dans l’affaire en cause » et a condamné la province Nord à une somme inférieure à celle prononcée par le tribunal administratif.
Ainsi saisi, le Conseil d’Etat commence par rappeler les dispositions des articles L. 213-1 et L. 213-2 du Code de justice administrative (CJA) relative à la médiation. Aux termes de l’article L. 213-2 du CJA, « Le médiateur accomplit sa mission avec impartialité, compétence et diligence.
Sauf accord contraire des parties, la médiation est soumise au principe de confidentialité. Les constatations du médiateur et les déclarations recueillies au cours de la médiation ne peuvent être divulguées aux tiers ni invoquées ou produites dans le cadre d’une instance juridictionnelle ou arbitrale sans l’accord des parties […] ».
Partant, le Conseil d’Etat juge que « eu égard aux conditions d’intervention du médiateur […], le principe d’impartialité s’oppose à ce qu’un magistrat administratif choisi ou désigné comme médiateur, en application de l’article L. 213-1 du code de justice administrative, participe à la formation de jugement chargée de trancher le différend soumis à la médiation ou conclue comme rapporteur public sur celui-ci.
Par suite, c’est sans commettre d’erreur de droit que la cour administrative d’appel de Paris a annulé pour irrégularité le jugement du 16 mai 2019 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie au motif qu’un magistrat de ce tribunal avait exercé successivement les fonctions de médiateur et de rapporteur public dans l’affaire en cause. »