La compatibilité d’un projet d’exploitation commerciale doit s’apprécier au regard des orientations générales du SCOT
CE, 11 octobre 2017, Fédération des artisans et commerçants de Caen, n° 401807, sera mentionné aux tables du Recueil Lebon
Le Conseil d’Etat vient de rendre une décision intéressante en matière de SCOT et d’aménagement commercial (CE, 11 octobre 2017, Fédération des artisans et commerçants de Caen, n° 401807, sera mentionné aux tables du Recueil Lebon).
L’on se souvient de ce que l’article 17 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement a abrogé le dernier alinéa de l’article L. 122-1 du code de l’urbanisme en vertu duquel les autorisations d’aménagement commercial prévues par l’article L. 752-1 du code de commerce sont compatibles avec les schémas de cohérence territoriale (SCOT).
Mais le législateur avait prévu, dans le même article, que les SCOT en cours d’élaboration ou de révision approuvés avant le 1er juillet 2013 dont le projet de schéma a été arrêté par l’organe délibérant de l’établissement de coopération intercommunale (EPCI) avant 1er juillet 2012 pouvaient opter pour l’application des dispositions antérieures. Autrement posé, il était loisible aux auteurs du SCOT de maintenir le lien de compatibilité auparavant exigé entre les autorisations d’aménagement commercial et le document de référence à l’échelle intercommunale.
Le Conseil d’Etat conclut donc, dès lors que le droit d’option prévu par le législateur a été exercé par l’auteur du SCOT, à l’obligation de compatibilité des autorisations d’aménagement commercial avec le SCOT prévue par l’article L. 122-1 du code de l’urbanisme abrogé. Et, dans ce cadre, la grille d’analyse est connue :
« Considérant que l’article L. 122-1 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie et applicable au schéma de cohérence de Caen-Métropole adopté le 20 octobre 2011 en vertu des dispositions de l’article 17 de la loi du 12 juillet 2010, dispose que les autorisations d’aménagement commercial doivent être compatibles avec les schémas de cohérence territoriale ; qu’il prévoit que, à l’exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les schémas de cohérence territoriale peuvent contenir des normes prescriptives, ces derniers doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs ; qu’en matière d’aménagement commercial, s’il ne leur appartient pas, sous réserve des dispositions applicables aux zones d’aménagement commercial, d’interdire par des dispositions impératives certaines opérations de création ou d’extension relevant des qualifications et procédures prévues au titre V du livre VII du code de commerce, ils peuvent fixer des orientations générales et des objectifs d’implantations préférentielles des activités commerciales définis en considération des exigences d’aménagement du territoire, de protection de l’environnement ou de qualité de l’urbanisme ; que si de tels objectifs peuvent être pour partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux commissions d’aménagement commercial non de vérifier la conformité des projets d’exploitation commerciale qui leur sont soumis aux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais d’apprécier la compatibilité de ces projets avec les orientations générales et les objectifs qu’ils définissent »
Or, en l’espèce, la Cour administrative d’appel de Nantes avait, pour rejeter le recours formé à l’encontre d’une décision de la Commission nationale d’aménagement commercial critiquée au regard des dispositions du SCOT applicable, estimé inopérante l’invocation des orientations de ce schéma relatives aux documents d’urbanisme.
A tort. Il lui appartenait, selon la décision commentée, d’apprécier la compatibilité du projet avec les orientations générales du schéma de cohérence territoriale prises dans leur ensemble, y compris celles se présentant formellement comme régissant des actes distincts des autorisations d’exploitation commerciale (voir en ce sens, déjà : CE, 28 septembre 2005, Société Sumidis et société Coco Fruits, n°s 274706, 274707, p. 399 ; CE, 12 décembre 2012, Société Davalex, n° 353496, T. pp. 618-1018).
L’arrêt est donc annulé, et l’affaire renvoyée à la Cour.