PLU, cône de vue et zone non aedificandi
Par une décision du 14 juin 2021 (mentionnée aux Tables du recueil), le Conseil d’Etat a été amené à préciser le champ et la portée des articles L. 151-19 et L. 151-23 du Code de l’urbanisme (issus de l’ancien article L. 123-1-5 du même Code) qui, pour rappel, permettent à grands traits au règlement d’un PLU d’édicter des dispositions visant à protéger, mettre en valeur ou requalifier un élément du paysage dont l’intérêt le justifie.
Bref rappel du contexte
A l’occasion de la modification de son PLU, la commune de Pornic a souhaité se doter d’outils lui permettant de préserver les perspectives existantes sur son littoral. Et pour ce faire, la Commune a :
– d’une part, délimité des cônes de vue (qui partaient de quelques rues situées à proximité du front de mer) en interdisant toute construction à l’intérieur de ces cônes, l’objectif poursuivi étant de préserver l’idée d’une ville s’ouvrant sur l’océan ;
– et d’autre part, instauré une zone non aedificandi recouvrant plusieurs parcelles de terrains bâtis situés sur la frange littorale.
Propriétaire de trois parcelle rendues inconstructibles (en totalité ou partiellement) du fait de l’instauration de ces mesures de protection, la SCI des Sables a contesté la délibération approuvant la modification du PLU, sans succès devant le Tribunal administratif puis la Cour administrative d’appel de Nantes.
Ce qui a conduit la Société à se pourvoir en cassation à l’encontre de ce dernier arrêt.
La décision rendue
Dans sa décision, le Conseil d’Etat juge d’abord, après avoir rappelé que « l’un et l’autre de ces articles [les articles L. 151-19 et L. 151-23 du Code de l’urbanisme], issus de l’ancien article L. 123-1-5 du code de l’urbanisme, permettent au règlement d’un plan local d’urbanisme d’édicter des dispositions visant à protéger, mettre en valeur ou requalifier un élément du paysage dont l’intérêt le justifie« , que « le règlement peut notamment, à cette fin, instituer un cône de vue ou identifier un secteur en raison de ses caractéristiques particulières« .
Puis le Conseil d’Etat fixe ensuite un cadre à cette double faculté en précisant que « la localisation de ce cône de vue ou de ce secteur, sa délimitation et les prescriptions le cas échéant définies, qui ne sauraient avoir de portée au-delà du territoire couvert par le plan, doivent être proportionnées et ne peuvent excéder ce qui est nécessaire à l’objectif recherché. Une interdiction de toute construction ne peut être imposée que s’il s’agit du seul moyen permettant d’atteindre l’objectif poursuivi« .
Et appliquant ces principes au cas d’espèce, le Conseil d’Etat en déduit que « par suite, en jugeant que la commune de Pornic avait pu, dans le règlement de son plan local d’urbanisme, établir, d’une part, un cône de vue excluant toute construction et, d’autre part, une » zone non aedificandi « , qui interdit par nature toute construction, sans rechercher si ces interdictions, qui dérogent à la vocation d’une zone urbaine, constituaient, eu égard à l’ensemble des dispositifs existants, le seul moyen d’atteindre les objectifs recherchés, tels que relevés par les juges du fond, de valorisation des perspectives sur le littoral et de préservation de la frange littorale d’une urbanisation excessive, la cour a commis une erreur de droit« .
Le maniement de ces mesures de protection – régulièrement instituées par les auteurs de PLU – est donc, au final, strictement encadré par le Conseil d’Etat.