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Régularisation : au tour de la DUP !

Régularisation : au tour de la DUP !

La possibilité de régulariser un acte en cours d’instance, sous le contrôle du Juge administratif, bien connue des praticiens du droit de l’urbanisme (article L. 6005-1 du code de l’urbanisme pour les autorisations, voir CE, 27 mai 2019, Ministre de la cohésion des territoires et société MSE La Tombelle, n° 420554 ; article L. 600-9 du Code de l’urbanisme pour les PLU et SCOT ; voir CE, 22 décembre 2017, Commune de Sempy, n° 395963) a été étendue aux autorisations environnementales (article L. 181-18 du Code de l’environnement ; CE, Avis, 27 septembre 2018, Association danger de tempête sur le patrimoine rural, n° 420119).

La décision du Conseil d’Etat n° 437634 du 9 juillet 2021 s’inscrit dans cette veine jurisprudentielle.

Était discutée la légalité de l’arrêté du 9 mars 2015 déclarant d’utilité publique et urgents, au bénéfice du département de l’Hérault, les acquisitions et travaux nécessaires à la réalisation de liaison intercantonale d’évitement nord (dite LIEN) de Montpellier, entre l’A750 à Bel Air et la RD986 au nord de Saint-Gély-du-Fesc et mettant en compatibilité les POS et PLU des communes traversées.

Et, parmi les moyens soulevés à l’encontre de cette DUP, figurait le moyen tiré de l’irrégularité de l’avis émis par l’autorité environnementale, faute d’indépendance suffisante par rapport à l’autorité chargée d’autoriser le projet.

Au regard de la jurisprudence du Conseil d’Etat (CE, 20 septembre 2019, Ministre de la transition écologique et solidaire, n° 428274 ; CE, 5 février 2020, Association « Des évêques aux cordeliers », n°425451), le moyen était fondé.

En l’espèce, l’avis du préfet de la région Languedoc-Roussillon avait en effet été instruit par la DREAL de cette région, placée sous son autorité. Et le même préfet, en sa qualité de préfet du département de l’Hérault, lieu d’implantation du projet litigieux, a signé l’arrêté du 9 mars 2015 déclarant le projet d’utilité publique.

L’annulation était donc, en principe, inéluctable.

Le Conseil d’Etat, suivant les conclusions de son Rapporteure public, a, alors même qu’aucun texte ne le prévoit en la matière, ouvert la voie à une régularisation en cours d’instance. C’est, plus précisément, la solution dégagée en matière de régularisation d’une autorisation environnementale dans l’avis Association danger de tempête sur le patrimoine rural (CE, Avis, 27 septembre 2018, n° 420119) qui a été déclinée au mécanisme de la DUP.

Le mécanisme institué est le suivant :

« 16. Si le juge administratif, saisi de conclusions dirigées contre un arrêté déclarant d’utilité publique et urgents des travaux et approuvant la mise en compatibilité de plans d’occupation des sols et de plans locaux d’urbanisme, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu’une illégalité entachant l’élaboration ou la modification de cet acte est susceptible d’être régularisée, il peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu’à l’expiration du délai qu’il fixe pour cette régularisation. Si la régularisation intervient dans le délai fixé, elle est notifiée au juge, qui statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations.

17. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation, qui implique l’intervention d’une décision corrigeant le vice dont est entaché l’arrêté attaqué. Un vice de procédure, dont l’existence et la consistance sont appréciées au regard des règles applicables à la date de l’arrêté attaqué, doit en principe être réparé selon les modalités prévues à cette même date. Si ces modalités ne sont pas légalement applicables, notamment du fait de l’illégalité des dispositions qui les définissent, il appartient au juge de rechercher si la régularisation peut être effectuée selon d’autres modalités, qu’il lui revient de définir en prenant en compte les finalités poursuivies par les règles qui les ont instituées et en se référant, le cas échéant, aux dispositions en vigueur à la date à laquelle il statue« .

Autrement posé, le mécanisme de régularisation intervient en trois temps :

1./ une décision avant-dire-droit qui identifie, après un débat contradictoire, le vice de procédure (la décision vise uniquement une « illégalité entachant l’élaboration ou la modification » d’un arrêté de DUP) susceptible d’être régularisé ; ce jugement avant-dire-droit peut préciser les modalités de cette régularisation ;

2./ une mesure de régularisation ;

3./ une décision mettant fin à l’instance, en fonction de l’efficacité de la mesure de régularisation.

En l’espèce, le Conseil d’Etat a considéré que le vice de procédure qui entachait d’illégalité l’arrêté de DUP peut être réparé par la consultation, à titre de régularisation, d’une autorité présentant les garanties d’objectivité requises, c’est à dire par la mission régionale d’autorité environnementale (cf articles R. 122-6 à R. 122-8 et R. 122-24 du code de l’environnement).

Encore le Conseil d’Etat a-t-il précisé que « si l’avis de l’autorité environnementale recueilli selon les modalités précisées au point précédent ne diffère pas substantiellement de celui qui a été porté à la connaissance du public en application de l’article L. 122-1 du code de l’environnement, l’information du public sur le nouvel avis de l’autorité environnementale ainsi recueilli prendra la forme d’une publication sur internet, dans les conditions prévues à l’article R. 122-23 du code de l’environnement, dans sa rédaction issue du décret du 25 avril 2017« . Dans ce cas, le délai imparti pour notifier au Conseil d’Etat les mesures de régularisation est de trois mois.

Ce délai sera de neuf mois, « en revanche, si l’avis de l’autorité environnementale recueilli selon les modalités précisées au point précédent diffère substantiellement de celui qui a été porté à la connaissance du public » car « des consultations complémentaires devront être organisées à titre de régularisation, dans le cadre desquelles seront soumis au public, outre l’avis recueilli à titre de régularisation, tout autre élément de nature à régulariser d’éventuels vices révélés par ce nouvel avis« .

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