Qualification de contrat administratif d’une convention relative à l’exploitation d’une salle de spectacle conclue entre une commune et une société privée

Jurisprudence 12 mars 2018

Tribunal des conflits, 12 février 2018, SCP Ravisse, mandataire liquidateur judiciaire de la SARL The Congres House c/ Cne de Saint-Esprit, n° 4109

Dans le cadre de l’affaire commentée, le Tribunal des conflits était invité à se prononcer sur de la nature administrative ou privée d’une convention d’occupation d’une salle de spectacle communale par une société privée.

Aux termes du contrat considéré, conclu en juin 2001 entre la commune de Saint-Esprit et la SARL The Congress House, la salle de spectacle communale était mise à disposition de la société en vue d’y programmer et organiser des manifestations culturelles. En 2007, la commune décide de ne plus reconduire ce contrat venu à échéance. Cette décision fait l’objet d’une contestation par le mandataire liquidateur judiciaire de ladite société – qui entre temps avait fait faillite. Les juridictions judiciaires et administratives ayant successivement déclinées leur compétence pour connaître du contrat litigieux, le conflit a été renvoyé au Tribunal des conflits.

La Haute Juridiction, en rappelant l’objet de cette convention (mise à disposition d’une salle de spectacle en vue de la programmation et l’organisation des manifestations culturelles), suggère l’absence, à première vue, d’une quelconque spécificité de ce type de contrat. Mais elle relève immédiatement que « cependant » la commune « pouvait intervenir de façon significative dans l’activité de la société », et ce, de deux manières :
– en  « imposant à celle-ci la communication préalable de ses programmes à la commune » ;
– en « imposant de laisser la commune organiser douze manifestations pendant l’année ainsi que, avec de très courts préavis, deux manifestations mensuelles à sa convenance ».

De telles prérogatives reconnues au bénéfice de la personne conduisent le Tribunal des conflits à considérer que le contrat litigieux « devait être regardé comme comportant des clauses qui impliquaient, dans l’intérêt général, qu’il relève du régime exorbitant des contrats administratifs » et relevait en conséquence du juge administratif.

Cette décision s’inscrit pleinement dans le sillage d’une précédente décision du Tribunal des conflits qui avait déjà procédé à une reformulation de la définition de « la clause exorbitante du droit commun » en évoquant désormais les « clause[s] qui, notamment par les prérogatives reconnues à la personne publique contractante dans l’exécution du contrat, implique[nt], dans l’intérêt général, qu’il relève du régime exorbitant des contrats administratifs » (TC, 13/10/2014, Axa France IARD c/ MAIF, n° C3963). Comme l’indiquait alors une doctrine autorisée, « cette nouvelle formulation met la définition des clauses dont dépend la qualification administrative du contrat en harmonie avec les motifs justifiant l’exercice par la personne publique des prérogatives que lui reconnaît la jurisprudence » (Jean Lessi, Louis Dutheillet de Lamothe, AJDA 2014, p. 2180). En d’autres termes, le caractère exorbitant ne s’identifie plus tant dans la nature intrinsèque de la clause examinée que dans la finalité des prérogatives conférées par celle-ci à la personne publique au regard de l’intérêt général.

Le Conseil d’Etat a également, à son tour, fait application de cette nouvelle approche de la clause exorbitante de droit commun, dans une décision récente, rendue  en chambres réunies (CE, 5/02/2018, CNES, n° 414846).

 

Restons en contact Inscription Newsletter

X

Content for `two`
Content for `three`