Régime juridique des ordonnateurs et des comptables & rétroactivité « in mitius »

Le Conseil d'État fait application, au stade de la cassation, d'une loi répressive plus douce entrée en vigueur postérieurement à la sanction prononcée par la CDBF.

Jurisprudence 7 juin 2024

Dans cet arrêt du 30 avril dernier, le Conseil d’État livre ainsi une illustration de sa jurisprudence rendue le 7 octobre 2022, Sté KF3 Plus, en matière de rétroactivité « in mitius ».

Comme le souligne Monsieur le Rapporteur public, Nicolas AGNOUX, dans ses conclusions, cette affaire est la première occasion pour le Conseil d’État de tirer les conséquences contentieuses des paradoxes temporels résultant des conditions d’entrée en vigueur du nouveau régime de responsabilité financière des ordonnateurs institué par l’ordonnance du 23 mars 2022.

En l’espèce, la CDBF a été saisie de faits relatifs à la gestion administrative et financière d’un établissement. La Cour a, notamment, condamné la directrice générale de l’établissement à une amende sur le fondement des dispositions de l’ancien régime juridique de responsabilité des ordonnateurs.

Elle se pourvoit en cassation contre cette décision. Toutefois, au jour où le Conseil d’État statue le nouveau régime est entré en vigueur.

Ainsi saisi, le Conseil d’État rappelle qu’ :

« en vertu de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires ».

Découle de ce principe la règle selon laquelle la loi répressive nouvelle doit, lorsqu’elle abroge une incrimination ou prévoit des peines moins sévères que la loi ancienne, s’appliquer aux auteurs d’infractions commises avant son entrée en vigueur et n’ayant pas donné lieu à des décisions devenues irrévocables. Il appartient au juge du fond, saisi d’une contestation portant sur une sanction, de faire application, même d’office, d’une loi répressive nouvelle plus douce entrée en vigueur entre la date à laquelle l’infraction a été commise et celle à laquelle il statue. Il en va de même pour le juge de cassation si la loi nouvelle est entrée en vigueur postérieurement à la décision frappée de pourvoi. »

En l’espèce, l’ordonnance du 23 mars 2022 a abrogé les dispositions sur le fondement desquelles la requérante a été condamnée. En effet, elle redéfinit les conditions dans lesquelles peut être mise en cause la responsabilité financière des gestionnaires publics.

La Haute Juridiction juge qu’eu « égard aux critères de qualification des infractions ainsi redéfinis, ces dispositions, entrées en vigueur au 1er janvier 2023, doivent être regardées comme constituant une loi répressive nouvelle plus douce que les dispositions antérieures dont la Cour de discipline budgétaire et financière a fait application ». Dès lors, elles font obstacle au maintien du dispositif de la décision attaquée.


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