CE, 25 janvier 2017, Commune de Port-Vendres, n° 395314
Par une décision en date du 25 janvier 2017 qui sera publié au recueil Lebon, le Conseil d’Etat juge qu’un motif tiré de la continuité du service public peut faire échec à la liberté normalement offerte à la personne publique pour refuser le renouvellement d’une convention d’occupation de son domaine public arrivée à son terme.
En l’espèce, les juges du Palais Royal était saisis de la décision de la commune de Port-Vendres de ne pas renouveler la convention d’occupation qu’elle avait conclu avec l’association départementale des pupilles de l’enseignement public des Pyrénées-Orientales (ADPEP 66), portant sur l’occupation de l’immeuble communal dit « Le Loup de mer », afin d’accueillir un centre éducatif renforcé pour des jeunes gens relevant de la protection judiciaire de la jeunesse.
Aux termes de sa décision, le Conseil d’Etat rappelle, d’abord, la solution ancienne en droit selon laquelle « il résulte des principes généraux de la domanialité publique que les titulaires d’autorisations ou de conventions d’occupation temporaire du domaine public n’ont pas de droit acquis au renouvellement de leur titre ».
Mais le Conseil d’Etat ajoute qu’ « il appartient au gestionnaire du domaine d’examiner chaque demande de renouvellement en appréciant les garanties qu’elle présente pour la meilleure utilisation possible du domaine public. Il peut décider, sous le contrôle du juge, de rejeter une telle demande pour un motif d’intérêt général. Pour déterminer si un tel motif existe, il y a lieu, de tenir compte, le cas échéant, parmi l’ensemble des éléments d’appréciation, des contraintes particulières qui pèsent sur l’activité de l’occupant, notamment de celles qui peuvent résulter du principe de continuité du service public ».
En d’autres termes, en l’absence de motif d’intérêt général, le principe général de continuité du service public peut justifier une limitation de la liberté d’une commune de recouvrir, au terme d’une convention de mise à disposition, la pleine jouissance de son domaine quand celui-ci est affecté à un service public.
Cette décision paraît à première vue louable tant il est important de préserver sur notre territoire les services publics qui donnent satisfaction.
Mais sur le long terme, les conséquences de cette jurisprudence pourraient selon nous être néfaste : en portant ainsi atteinte au droit de propriété de la personne publique qui, engagée dans une convention d’occupation domaniale peut se trouver de facto dépossédée de son domaine au delà même du terme initial de la convention de mise à disposition, il est en effet à craindre que les collectivités territoriales hésitent à l’avenir à autoriser l’occupation de leur domaine immobilier pour l’exercice de missions de service public.