Par une ordonnance du 23 février dernier, le juge du référé du Tribunal administratif de Nice s’est prononcé sur la possibilité, pour un pouvoir adjudicateur (en l’occurrence la Régie « Parcs d’Azur »), de conclure sans publicité ni mise en concurrence un marché public pour la « conception et la réalisation » d’une statue de Jeanne d’Arc.
Saisi dans le cadre d’un référé suspension introduit par le Préfet des Alpes-Maritime, le juge unique accepte la nature d’œuvre d’art et estime qu’elle « ne pouvait être confiée qu’à un opérateur économique unique, l’atelier Missor, pour des raisons artistiques et techniques tenant à son caractère propre ».
Le recours à l’article R.2122-3 1° du Code de la commande publique, qui autorise la conclusion d’un marché sans publicité ni mise en concurrence préalables pour la création ou l’acquisition d’une œuvre d’art ou d’une performance artistique unique avec un opérateur économique déterminé, n’était donc pas de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité du marché en l’espèce.
De manière intéressante, notamment pour la création d’œuvres monumentales, le juge ne s’oppose pas à ce que l’opérateur économique déterminé soit une personne morale, et donc à l’intervention d’une pluralité d’artistes pour créer l’œuvre commandée.
Enfin, le juge estime qu’inclure la conception et la réalisation du socle de la statue dans le périmètre du marché n’est pas, compte tenu de la nature de l’œuvre et de son caractère indissociable avec celle-ci, de nature à faire naître un doute sérieux sur la régularité du marché au regard de l’obligation d’allotissement.
Tacitement, le socle est ainsi considéré comme une composante à part entière de l’œuvre et donc insusceptible d’être confié à un autre opérateur économique. La position est assurément pragmatique.
Le jugement de l’affaire au fond, le cas échéant, permettra peut-être de disposer d’une motivation plus étayée susceptible de lever certaines interrogations sur les conditions de recours à cette dérogation, encore nombreuses aujourd’hui.