Par un arrêt du 15 septembre 2022*, la Cour de justice de l’Union européenne rappelle l’obligation qui s’impose au pouvoir adjudicateur, en toute circonstance, de vérifier les offres anormalement basses.
Ce contrôle doit être justifié au regard de l’ensemble des éléments en possession du pouvoir adjudicateur, l’appréciation de ce dernier pouvant être contrôlée dans le cadre d’un recours contre la procédure de passation, et ce même en l’absence de décision explicite relative à l’offre.
En l’espèce la société Veridos, candidate au marché de sécurité lancé par le vice-ministre de l’intérieur de Bulgarie le 15 août 2018, avait vu ses propositions rejetées.
Elle avait alors formé, devant la commission de protection de la concurrence un recours qui sera finalement rejeté.
Le 13 juillet 2020, la société forme un pourvoi en cassation devant la cour administrative suprême.
C’est dans le cadre de ce pourvoi que la CJUE a été saisie par la Cour administrative suprême de plusieurs questions préjudicielles.
Ainsi la juridiction de renvoi demande :
*d’une part, si le pouvoir adjudicateur peut se voir exempter par le droit national du contrôle de l’offre anormalement basse,
*d’autre part, si le pouvoir adjudicateur est dans l’obligation de rendre une décision motivée constatant l’existence d’une offre anormalement basse ou s’il peut défendre son appréciation dans le cadre d’un contrôle juridictionnel.
Concernant l’appréciation des offres anormalement basses par le pouvoir adjudicateur.
La cour précise la méthode d’appréciation qui doit être conduite par ce dernier aux titres des articles 38 et 49 de la directive 2009/81/CE, correspondant aux « domaines de la défense et de la sécurité », mais dont les dispositions sont en substance identiques à la directive 2014/24 du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics.
L’appréciation de l’offre anormalement basse doit être faite par le pouvoir adjudicateur sur la base de l’ensemble des éléments pertinents en possession.
Dès lors, si la législation nationale, ou un pouvoir adjudicateur dans ses documents de la consultation, établissent une méthode d’évaluation de l’offre anormalement basse insusceptible d’être mise en œuvre dans le cadre de la procédure, le pouvoir adjudicateur demeure tenu de procéder à une appréciation de l’offre, globalement, au regard des éléments à sa disposition.
Concernant l’obligation de rendre une décision motivée constatant l’existence d’une offre anormalement basse
Par ailleurs, lorsqu’un pouvoir adjudicateur soupçonne une offre d’être anormalement basse, ce dernier doit mettre en œuvre une procédure contradictoire avec le soumissionnaire concerné avant toute décision.
A l’issue de la procédure de vérification, le pouvoir adjudicateur devra prendre une décision expresse et motivée d’admission ou de rejet. Cette décision étant bien sûr susceptible d’être contrôlée par le juge dès sa communication.
En revanche, la Cour rappelle que dans l’hypothèse inverse, le législateur de l’Union n’a pas imposé aux pouvoirs adjudicateurs l’obligation d’adopter une décision explicite et motivée constatant l’absence d’offres anormalement basses.
Le cas échéant, lorsque le pouvoir adjudicateur n’a pas engagé une procédure de vérification concernant l’éventuel caractère anormalement bas d’une offre, au motif qu’il a considéré qu’aucune des offres qui lui ont été soumises ne présentait un tel caractère, son appréciation peut être contestée au stade de l’attribution du contrat.
La décision est disponible ici.
*CJUE, 15 septembre 2022, Veridos, aff. C-669/20