Retour sur l’interdiction de tenue des marchés alimentaires et sur ses dérogations

TextesAnalyse 7 avril 2020

Malgré l’épidémie de coronavirus, les marchés alimentaires sont restés plus d’une semaine autorisés sans restriction gouvernementale. Ce qui faisait peser sur les maires une obligation de vigilance particulière, pouvant aller jusqu’à la fermeture, si les circonstances l’exigeaient, ainsi que la Gazette l’avait rappelé (voir article Gazette du 23 mars 2020).

Le 22 mars 2020, le Conseil d’Etat, statuant sur un référé liberté (n° 439674) portant sur les mesures de confinement, avait déploré le manque d’encadrement du fonctionnement des marchés ouverts qui aboutissait à permettre « des déplacements et des comportements contraires à la consigne générale ».

En conséquence, le Conseil d’Etat enjoignait au Premier Ministre de prendre des mesures dans de brefs délais aux fins « d’évaluer les risques pour la santé publique du maintien en fonctionnement des marchés ouverts, compte tenu de leur taille et de leur niveau de fréquentation ».

D’un extrême à l’autre, le Gouvernement n’a pas choisi d’encadrer après évaluation, mais d’interdire purement et simplement la tenue des marchés, couverts comme non couverts, et quel qu’en soit  l’objet (décret n° 2020-293 du 23 mars 2020, art. 8, III). Il est cependant prévu que des « autorisations » puissent être ponctuellement accordées par les préfet, après « avis » du maire, à deux conditions de fond : la tenue du marché doit répondre à un besoin d’approvisionnement de la population et (ii) les conditions d’organisation ainsi que les contrôles mis en place doivent être propres à garantir le respect des dispositions de l’article 1er et de l’article 7 de l’ordonnance.

En pratique, s’agissant des marchés alimentaires, « l’avis » des maires est devenu une véritable demande de dérogation, qui doit démontrer, de manière très concrète, le respect des deux conditions précitées : outre la justification de l’insuffisance de l’offre d’approvisionnement dans le secteur (commerces classiques et supermarchés ouverts à proximité ; état des transports collectifs), doivent être décrites les mesures barrières envisagées (disposition des lieux, circulation, distance minimale de deux mètres entre les étals, marquage au sol), les conditions de contrôle par la municipalité et la liste nominative des exposants ainsi que leurs adresses (en toute logique, seront privilégiés les vendeurs de produits alimentaires locaux en circuit court, dont les produits ne sont pas couverts par ailleurs par l’offre d’approvisionnement).

Les premiers retours montrent une assez grande sévérité des préfectures dans la mise en œuvre du dispositif, l’appréciation du bilan risque/nécessité conduisant à maintenir la fermeture de nombreux de marchés alimentaires habituels.

On relèvera au passage un véritable transfert de compétence : les maires, en première ligne tant que que le gouvernement n’avait pas agi, sont maintenant totalement dessaisis, ou plutôt réduit au rang de simples demandeurs. On peut s’en attrister, et quelques maires ne s’en privent pas. On peut aussi constater que cette réorganisation permet à certains élus d’éviter de devoir trancher de véritables dilemmes : fermer les marchés, ou les laisser persister, à la demanded’une partie de la population. Les mêmes parfois qui, demain,pourraient reprocher au maire de les avoir exposés à la contamination .

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