Vers une distinction claire entre autorité environnementale et autorité en charge de l’examen au cas par cas

Projets de textes 6 mai 2019

Le Gouvernement a déposé à l’Assemblée nationale, le mardi 30 avril dernier, une nouvelle version du projet de loi relatif à l’énergie et au climat. A grands traits, ce texte prévoit de réviser certains objectifs de la politique de l’énergie et du climat, de créer un Haut Conseil pour le climat et de fermer les dernières centrales à charbon. Ce projet contient également – ce qui seul retiendra notre attention à ce stade – une mesure de simplification concernant la procédure d’évaluation environnementale, susceptible d’intéresser les praticiens du droit de l’urbanisme et de la construction.

La mesure envisagée est au demeurant bien ciblée, comme le rappelle le Conseil d’Etat dans son avis émis le 25 avril 2019 (accessible ici) que :

« 14. Les projets de travaux, d’ouvrages et d’aménagements qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou sur la santé humaine font l’objet d’une évaluation environnementale en vertu de la directive du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l’évaluation environnementale de certains projets publics et privés sur l’environnement, et en application du code de l’environnement. Les projets qui sont soumis à une évaluation environnementale le sont, en vertu du code de l’environnement, soit « automatiquement » en fonction de critères et de seuils définis réglementairement, soit, pour certains, à la suite d’un examen au cas par cas qui consiste à déterminer si un projet doit, en raison de ses incidences sur l’environnement, être soumis à évaluation environnementale. Cet examen au cas par cas est jusqu’à présent confié par la loi à l’« autorité environnementale », qui est l’autorité chargée de responsabilités spécifiques en matière d’environnement, et en tout premier lieu chargée de procéder à l’évaluation environnementale. L’autorité environnementale exerce ainsi, actuellement, deux missions distinctes, d’évaluation environnementale des projets, mais aussi, en amont, d’examen au cas par cas des projets relevant de cette procédure, en vue de leur soumission éventuelle à une évaluation environnementale.

15. Le projet propose que ces deux missions soient désormais confiées à des autorités différentes. Ainsi, l’évaluation environnementale des projets demeurerait naturellement confiée à l’autorité environnementale spécifiquement compétente, mais l’examen au cas par cas serait confié à une autre autorité, par exemple le préfet de région. A cette fin, le projet renvoie au pouvoir réglementaire le soin de déterminer l’autorité chargée de l’examen au cas par cas.

16. Cette mesure ne soulève pas de difficulté juridique. En effet, elle n’entraîne aucune modification en ce qui concerne l’évaluation environnementale elle-même des projets, et est conforme à la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement. En effet, si cette directive impose que l’évaluation environnementale soit réalisée par une autorité chargée de responsabilités spécifiques en matière d’environnement, elle n’impose pas aux Etats membres, en revanche, de confier à une telle autorité l’examen au cas par cas des projets relevant de cette procédure, et leur laisse au contraire la libre détermination de l’autorité chargée de cet examen, sous réserve de son autonomie fonctionnelle par rapport à l’autorité compétente pour autoriser un projet ou en assurer la maîtrise d’ouvrage. D’ailleurs, le Conseil d’Etat a déjà admis, lors de l’examen du projet de loi pour un Etat au service d’une société de confiance, une dérogation à la compétence de l’autorité environnementale, au profit de l’autorité de police compétente, pour procéder à l’examen au cas par cas de certains projets spécifiques (avis du 23 novembre 2017, point 86).

Dans la mesure où le projet généralise, pour l’examen au cas par cas des projets relevant de cette procédure, la compétence d’une autorité administrative autre que l’autorité environnementale, le Conseil d’Etat considère qu’il y a lieu, à l’occasion de la nouvelle rédaction, de supprimer la disposition dérogatoire issue de la loi pour un Etat au service d’une société de confiance figurant au dernier alinéa du IV de l’article L. 122-1 du Code de l’environnement.

17. Le Conseil d’Etat relève enfin que si la disposition proposée est prévue en premier lieu en vue d’accélérer les projets d’installations de production d’énergie à partir de sources renouvelables, en tant qu’ils relèvent de l’examen au cas par cas, elle concerne en fait, de façon beaucoup plus générale, l’ensemble des projets qui relèvent d’un examen au cas par cas en vue d’une éventuelle évaluation environnementale : elle a ainsi un caractère environnemental qui dépasse le domaine de l’énergie et du climat. Dès lors, il estime nécessaire de modifier l’intitulé du chapitre comportant cette disposition pour lui donner la portée adaptée, en faisant référence à l’évaluation environnementale, et par suite de compléter l’intitulé du projet de loi par une référence à l’environnement ».

En cet état, le projet finalement soumis au Parlement a été modifié pour prévoir, en son article 4, inséré dans un chapitre III consacré aux « mesures de simplification relatives à l’évaluation environnementale » (formule plus large que la rédaction initiale, ainsi que le recommandait la Haute assemblée) :

« Le chapitre II du titre II du livre Ier du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° L’article L. 122-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du II, les mots : « effectué par l’autorité environnementale » sont supprimés ;

b) Au dernier alinéa du même II, les mots : « autorité environnementale » sont remplacés par les mots : « autorité chargée de l’examen au cas par cas » et les mots : « après examen au cas par cas » sont supprimés ;

c) Le premier alinéa du IV est remplacé par les dispositions suivantes :

« IV. – Lorsqu’un projet relève d’un examen au cas par cas, l’autorité chargée de cet examen est saisie par le maître d’ouvrage d’un dossier présentant le projet afin de déterminer si celui-ci doit être soumis à évaluation environnementale.

« L’autorité chargée de l’examen au cas par cas est désignée par décret en Conseil d’État. Ne peut être désignée une autorité dont les services ou les établissements publics relevant de sa tutelle sont chargés de l’élaboration du projet ou assurent sa maîtrise d’ouvrage. » ;

2° Au II de l’article L. 122-3-4, les mots : « l’autorité environnementale, lors de l’examen au cas par cas, » sont remplacés par les mots : « l’autorité chargée de l’examen au cas par cas ».

La procédure étant accélérée, l’on peut espérer une modification rapide du Code de l’environnement.

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