La protection fonctionnelle en cas de risque avéré ?

Le Conseil d'État rappelle ici comment appliquer l'art. 11 de la loi de 1983 sur les droits et obligations des fonctionnaires

Jurisprudence 24 juin 2024

En l’espèce, un agent public victime d’un attentat sur son lieu de travail avait demandé à bénéficier de la protection fonctionnelle. Le ministre de l’intérieur ayant refusé sa demande, l’agent a saisi le tribunal administratif.

Le juge de première instance a annulé la décision du ministre et l’a enjoint d’accorder la protection fonctionnelle à la requérante. Après avoir été débouté en appel, le ministre de l’intérieur s’est pourvu en cassation.

Dans sa décision, le Conseil d’État rappelle que les dispositions de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires – reprises aux articles L. 134-1 et L.134-5 du Code général de la fonction publique – établissent « à la charge de la collectivité publique et au profit des fonctionnaires, lorsqu’ils ont été victimes d’attaques à l’occasion ou du fait de leurs fonctions, sans qu’une faute personnelle puisse leur être imputée, une obligation de protection à laquelle il ne peut être dérogé, sous le contrôle du juge, que pour des motifs d’intérêt général.

Cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l’agent concerné est exposé, mais aussi de lui assurer une réparation adéquate des torts qu’il a subis. Cette protection n’est due, cependant, que lorsque les agissements en cause visent l’agent concerné à raison de sa qualité d’agent public. »

Les juges de cassation ajoutent que « cette obligation de protection s’applique également lorsque l’agent est directement et personnellement exposé à un risque avéré d’atteinte volontaire à son intégrité physique ou à sa vie en raison de sa qualité d’agent public. »

Ainsi, « en jugeant, après avoir estimé par une appréciation souveraine exempte de dénaturation que l’agent avait ainsi été directement et personnellement exposée à un risque avéré de subir une atteinte volontaire à son intégrité physique, qu’elle satisfaisait aux conditions d’octroi de la protection fonctionnelle, la cour n’a pas commis d’erreur de droit. »

Il ressort des conclusions du Rapporteur public, Monsieur Nicolas LABRUNE, que le ministre de l’intérieur semblait redouter « que soient reconnues comme ouvrant le droit au bénéfice de la protection fonctionnelle « des attaques de masse, présentant un caractère général et impersonnel », de même que le simple risque pour un fonctionnaire de subir une atteinte à son intégrité, quand bien même cette atteinte serait demeurée purement éventuelle. »

Un tel risque n’existe pas pour Monsieur le Rapporteur public, qui estime que le ministre donne aux arrêts attaqués une portée qu’ils n’ont pas. Il ajoute que « si la cour a reconnu le droit à la protection fonctionnelle des intéressées, c’est bien parce qu’elle a estimé, au vu des circonstances particulières de l’espèce, que celles-ci avaient été réellement et personnellement menacées, à raison de leur qualité d’agents publics, et non pas parce qu’elle aurait estimé qu’il est possible de bénéficier de la protection fonctionnelle sans avoir été personnellement visé, ou sans avoir été réellement menacé à l’occasion ou du fait de ses fonctions. »

Ainsi, les décisions des juridictions auraient été différentes si la demande de protection fonctionnelle avait été formée par un agent qui n’a pas été directement confronté à l’agresseur.

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