Le Gouvernement vient de diffuser une « fiche technique« afin de rappeler les outils issus du Code de l’urbanisme permettant d’encadrer l’émergence des dark stores en ville.
En effet, parmi les nombreux changements insufflés par la pandémie, l’accroissement des services de livraison – plus précisément de livraison de courses – à domicile a mené à l’ouverture de nombreux espaces de « stockage et de préparation des livraisons, sans accueil du public » appelé dark stores. Pour permettre une livraison rapide, ces locaux de stockage doivent être implantés au plus proche des lieux de distribution, le plus souvent dans les centres-villes des agglomérations.
La fiche technique rappelle d’abord la destination, au sens du droit de l’urbanisme, à laquelle appartiennent les dark stores.
L’on rappellera que l’article R. 151-27 du Code de l’urbanisme, introduit par la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR), détermine cinq destinations :
« 1° Exploitation agricole et forestière ;
2° Habitation ;
3° Commerce et activités de service ;
4° Equipements d’intérêt collectif et services publics ;
5° Autres activités des secteurs secondaire ou tertiaire ».
L’article R. 151-28 du Code de l’urbanisme précise, pour chacune des 5 destinations, les sous-destinations recensées :
« 1° Pour la destination » exploitation agricole et forestière » : exploitation agricole, exploitation forestière ;
2° Pour la destination » habitation » : logement, hébergement ;
3° Pour la destination » commerce et activités de service » : artisanat et commerce de détail, restauration, commerce de gros, activités de services où s’effectue l’accueil d’une clientèle, cinéma, hôtels, autres hébergements touristiques ;
4° Pour la destination » équipements d’intérêt collectif et services publics » : locaux et bureaux accueillant du public des administrations publiques et assimilés, locaux techniques et industriels des administrations publiques et assimilés, établissements d’enseignement, de santé et d’action sociale, salles d’art et de spectacles, équipements sportifs, autres équipements recevant du public ;
5° Pour la destination » autres activités des secteurs secondaire ou tertiaire » : industrie, entrepôt, bureau, centre de congrès et d’exposition ».
Les dark stores, dédiés à la préparation des commandes par le personnel et récupérées par des livreurs, n’ont a priori pas vocation à accueillir de la clientèle.
Dans ces conditions, ils ne s’analysent non pas en tant que commerces mais en tant qu’entrepôts, uniquement concernés par le stockage. Seuls les dark stores qui prévoient également un service de retrait, et recevant dès lors une clientèle, peuvent être « rangés » dans la destination « commerce et activités de services ».
Ce faisant, les différentes règles des PLU et PLUi, à jour de la réforme des destinations, propres à la destination « entrepôt » et, le cas échéant, à la destination « commerce » sont opposables aux dark stores.
De la même manière, pour les communes couvertes par un PLU (non « alurisé« ) appliquant encore les anciennes dispositions de l’article R. 123-9 du Code de l’urbanisme, il convient de se référer à la destination « entrepôt » et, uniquement dans l’hypothèse d’un accueil de clientèle, à la destination « commerce » (étant précisé que si le PLU prévoit dans son lexique ses propres définitions des commerces et des entrepôts, celles-ci demeurent toutefois applicables).
La fiche énumère, ensuite, les outils règlementaires d’encadrement susceptibles d’être mobilisés au sein, notamment, des PLU :
• les dispositions du PLU encadrant l’implantation des destinations de construction, en application de l’article L. 151-9 du Code de l’urbanisme ;
• la protection de la diversité commerciale, et notamment du commerce de détail et de proximité, dans certains îlots délimités par le PLU, en application de l’article L. 151-16 du Code de l’urbanisme (premier alinéa) ;
• la détermination de secteurs dans lesquels la préservation ou le développement d’infrastructures et d’équipements logistiques est nécessaire et, le cas échéant, de la nature de ces équipements ainsi que les prescriptions permettant d’assurer cet objectif, en application de l’article L. 151-16 du Code de l’urbanisme (second alinéa) ;
• l’application des OAP définissant des secteurs de mixité fonctionnelle et notamment fixant un pourcentage de commerce à réaliser ;
La fiche rappelle également que le document d’aménagement artisanal, commercial et logistique (DAACL) du SCoT détermine les secteurs d’implantation privilégiés des équipements commerciaux susceptibles d’avoir un impact significatif sur l’aménagement du territoire (art. L. 141-6 du Code de l’urbanisme). A ce titre, les auteurs d’un SCOT peuvent définir la localisation préférentielle des locaux logistiques commerciaux, dont peuvent relever les dark stores.
Enfin, la fiche technique rappelle le régime applicable en matière d’application du droit des sols (notamment le contrôle opéré en cas de changement de destination), celui applicable en cas d’autorisation d’exploitation commerciale, ainsi que les sanctions (pénales et administratives) applicables en cas d’implantation d’un dark store en contrariété avec les règles d’urbanisme.
Au final, les collectivités sont donc loin d’être démunies, au moins en théorie, pour tenter de réguler l’implantation des dark stores.