La loi n°2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique apporte un certain nombre d’évolutions dans les rapports entre communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), avec pour fil conducteur la « revalorisation » de la place de la commune au sein de l’intercommunalité. Nous vous proposons donc un aperçu des principales mesures introduites par la loi intéressant le couple communes-intercommunalités.
Pacte de gouvernance
L’article 1er de la loi crée un article L. 5211-11-2 du CGCT qui prévoit l’élaboration d’un pacte de gouvernance destiné à encadrer les relations entre les EPCI à fiscalité propre et leurs communes membres. Si son adoption n’est pas obligatoire, le texte impose toutefois aux présidents d’EPCI à fiscalité propre, après chaque renouvellement des conseils municipaux ou ensuite d’une fusion ou d’une scission, d’inscrire à l’ordre du jour du conseil communautaire la tenue d’un débat et d’une délibération sur la question de l’élaboration du pacte.
Le contenu du pacte de gouvernance est potentiellement assez large puisqu’il peut prévoir les conditions dans lesquelles l’EPCI à fiscalité propre peut confier, par convention, la création ou la gestion de certains équipements ou services relevant de ses attributions à une ou plusieurs de ses communes membres ou encore déterminer les conditions dans lesquelles le président de l’EPCI peut déléguer aux maires l’engagement de certaines dépenses en matière d’entretien courant d’infrastructures ou de bâtiments communautaires (voirie par exemple). Le pacte peut également créer des « commissions spécialisées » réunissant les maires ainsi que des « conférences territoriales des maires » selon des périmètres géographiques ou de compétences déterminés. Il peut encore définir les conditions dans lesquelles le bureau de l’intercommunalité peut proposer la réunion de la « conférence des maires » pour avis sur des sujets d’intérêt communautaire, les orientations en matière de mutualisation de services entre les communes et l’intercommunalité ou encore les objectifs de parité au sein des organes de gouvernance et des commissions.
Ce pacte de gouvernance est, le cas échéant, adopté par l’EPCI à fiscalité propre après avis des conseils municipaux, dans un délai de 9 mois à compter du renouvellement général des conseils municipaux ou d’une opération de fusion ou de scission.
Conférence des maires
Un nouvel article L. 5211-11-3 du CGCT rend désormais obligatoire la création d’une conférence des maires dans tous les EPCI à fiscalité propre, exception faite du cas où le Bureau de l’Etablissement comprend l’ensemble des maires des communes membres. Réunissant l’ensemble des maires des communes membres, elle est présidée par le Président de l’intercommunalité et se réunit à son initiative ou, dans la limite de quatre fois par an, à la demande d’un tiers des maires.
Diffusion de l’information de l’EPCI vers les communes
Afin d’améliorer la diffusion et le partage d’informations au sein des intercommunalités, l’article L. 5211-40-2 du CGCT prévoit que les conseillers municipaux des communes membres d’un EPCI – communauté/métropole/syndicat intercommunal – qui ne sont pas membres de son organe délibérant sont informés des affaires soumises à délibération.
Plus concrètement, ces élus doivent désormais être destinataires avant la réunion de l’organe délibérant de l’EPCI des copies des convocations aux séances et, le cas échéant, des notes explicatives de synthèse adressées aux conseillers communautaires/syndicaux. Doivent également leur être communiqués le rapport sur les orientations budgétaires, les engagements pluriannuels et la gestion de la dette, le rapport sur l’activité de l’établissement, les comptes rendus des séances de l’organe délibérant ainsi que les avis rendus par la conférence des maires.
Cette nouvelle règle trouve également à s’appliquer aux conseillers municipaux/communautaires/syndicaux ne siégeant pas au sein de l’organe délibérant d’un syndicat mixte auquel appartient leur commune/EPCI à fiscalité propre/syndicat intercommunal.
Restitution des compétences aux communes
La loi crée un nouvel article L. 5211-17-1 du CGCT consacré à la procédure de restitution aux communes des compétences non obligatoires des EPCI.
Pour mémoire, en cas de restitution de compétences, il était auparavant recouru, dans le silence de la loi et en application du principe de parallélisme des procédures, à l’article L. 5211-17 du CGCT régissant la procédure de transfert de compétences. L’objectif de cet article est donc, selon les travaux parlementaires de la loi, de « sécuriser juridiquement » la restitution de compétence par un EPCI à ses communes membres en créant un article dédié.
S’agissant de la procédure à suivre, rien de nouveau puisqu’il s’agit de la transposition de la procédure de transfert de compétence : la restitution peut être décidée à tout moment, par délibérations concordantes de l’EPCI et des conseils municipaux statuant à la majorité requise pour la création de l’établissement (cf article L. 5211-5 du CGCT).
Compétences optionnelles
La catégorie des compétences optionnelles des communautés de communes et d’agglomération est supprimée. Il reste donc deux catégories de compétences des EPCI à fiscalité propre : les compétences obligatoires – fixées par la loi – et les compétences facultatives qui peuvent être librement transférées aux EPCI à fiscalité propre ou restituées par ces derniers à leurs communes membres.
En pratique, les compétences optionnelles qui étaient, au jour de la promulgation de la loi, exercées par les communautés de communes ou d’agglomération, demeurent des compétences des intercommunalités mais sont désormais considérées comme facultatives et peuvent donc, à tout moment, faire l’objet de restitutions aux communes, dans le respect de la nouvelle procédure de l’article L. 5211-17-1 du CGCT.
Eau et assainissement
Si le principe du transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux communautés de communes et d’agglomération au 1er janvier 2020 est confirmé, la loi étend la faculté de reporter le transfert jusqu’au 1er janvier 2026 aux communes membres des communautés de communes qui exercent en partie seulement, sur tout ou partie du territoire de ces communes, l’une ou l’autre des compétences en matière d’eau ou d’assainissement – pour rappel, le fait que la communauté de communes exerce dans son intégralité l’une ou l’autre de ces compétences faisait auparavant obstacle à ce que les communes mettent en œuvre le droit de report – . Cet assouplissement doit cependant être immédiatement relativisé dans la mesure où les communes avaient jusqu’au 31 décembre 2019 pour s’opposer au transfert, soit quatre jours après la promulgation de la loi, ce qui a en pratique rendu théorique la mise en œuvre de la faculté de report pour les communes concernées.
Par ailleurs, la loi a introduit une disposition prévoyant expressément que les communautés de communes et d’agglomération disposent de la faculté de déléguer tout ou partie des compétences en matière d’eau, d’assainissement des eaux usées et de gestion des eaux pluviales au profit d’une ou plusieurs de leurs communes membres ou d’un syndicat intercommunal existant au 1er janvier 2019 et inclus en totalité dans le périmètre de la communauté. Une convention devra être conclue entre l’EPCI à fiscalité propre et la commune ou le syndicat afin de préciser la durée et les modalités d’exécution de la délégation, notamment en terme de qualité de service. Il est précisé par la loi que toute commune peut demander à bénéficier d’une telle délégation, le conseil communautaire devant alors statuer sur cette demande dans un délai de trois mois et motiver un éventuel refus.
Promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme
Les communes touristiques érigées en stations classées de tourisme membres d’une communauté de communes ou d’agglomération peuvent délibérer, après avis de leur communauté, pour « conserver » ou « retrouver » la compétence en matière de promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme, sans condition de délai – pour rappel, la loi « Montagne 2 » du 28 décembre 2016 avait déjà ouvert cette possibilité mais les communes concernées n’avaient eu que jusqu’au 1er janvier 2017 pour délibérer en ce sens –. Lorsque cette compétence est « conservée » ou « retrouvée » par une commune, la communauté demeure compétente en matière de promotion touristique sur le territoire communal mais elle ne peut créer d’office de tourisme intercommunal.
Quant aux communes touristiques non classées appartenant à une communauté de communes, elles peuvent demander à se voir restituer la compétence promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme, une telle restitution nécessitant qu’il en soit décidé par délibérations concordantes du conseil communautaire et des conseils municipaux des communes membres statuant dans les conditions de majorité requises pour la création de la communauté (cf article L. 5211-5 du CGCT). Dans cette hypothèse également, la communauté de communes conserve, concurremment aux communes touristiques, l’exercice de la compétence de promotion du tourisme sur son territoire.
Enfin, l’animation touristique devient une compétence partagée – au sens de l’article L. 1111-4 du CGCT – entre les EPCI à fiscalité propre et leurs communes membres, ce qui laisse une certaine marge de manœuvre à ces dernières pour conduire des actions en la matière (le guide de la loi du ministère de la cohésion des territoires mentionne, par exemple, l’organisation d’évènements festifs et culturels).
Recrutement d’agents de police municipale par le président d’un EPCI à fiscalité propre
L’article L. 512-2 du Code de la sécurité intérieure ouvre la possibilité aux présidents d’EPCI à fiscalité propre de recruter des agents de police municipale pour les mettre en tout ou partie à disposition de leurs communes membres. Ce recrutement est subordonné à des délibérations concordantes de l’EPCI à fiscalité propre et de deux tiers au moins des conseils municipaux des communes représentant plus de la moitié de la population totale de celles-ci ou de la moitié au moins des conseils municipaux des communes représentant les deux tiers de la population totale de celles-ci.
Réalisation de prestations de services entre communes
L’article L. 5111-1 du CGCT autorise les communes, sans qu’elles n’aient désormais à appartenir au même EPCI à fiscalité propre, à conclure entre elles des conventions ayant pour objet la réalisation de prestations de services.
Révision des schémas départementaux de coopération intercommunale
L’obligation de révision des schémas départementaux de coopération intercommunale tous les 6 ans est, dans un souci de stabilité, supprimée par la loi.
Evolution des périmètres des communautés de communes et d’agglomération
La loi ouvre une possibilité de retrait des communautés d’agglomération sans l’accord de l’EPCI à fiscalité propre et une possibilité de scission à l’amiable des communautés de communes et d’agglomération en plusieurs EPCI à fiscalité propre.