Mener une fusion d’associations

Nos publications 7 mars 2022

Mounia Idrissi et Morgane Kermarrec ont co-écrit un article portant sur les fusions d’associations, publié dans la Gazette des communes le 9 février 2022.

 

Satellites des collectivités, les associations sont aujourd’hui souvent poussées, notamment dans un souci de cohérence géographique ou de mutualisation, à se restructurer. Longtemps peu encadrées, les procédures de fusion, scission et apport partiel d’actifs entre associations sont aujourd’hui régies par des dispositions contraignantes.

Décryptage par Mounia Idrissi et Morgane Kermarrec, avocates au sein du Cabinet Goutal, Alibert et associés.

Identifier le mode de restructuration adapté au projet

Régies depuis la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire par l’article 9 bis de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, les différentes modalités de regroupement d’associations sont au nombre de trois.

La plus classique est la fusion d’associations, qui revêt deux formes. Elle peut consister dans le fait, pour une association existante, d’absorber une ou plusieurs structures associatives, ces dernières lui transmettant leurs activités et patrimoine et étant dissoutes en conséquence sans être liquidées (fusion-­absorption). Pour repartir sur des bases nouvelles et éviter tout sentiment « d’annexion », la fusion peut aussi passer par la création d’une nouvelle association ayant vocation à absorber une ou plusieurs associations existantes, dissoutes sans liquidation après avoir apporté leurs activités et patrimoine à la nouvelle ­structure (fusion-création).

Une autre forme de restructuration est la scission d’association, les activités et le patrimoine de la structure existante étant scindés et transférés à au moins deux autres associations, le cas échéant nouvelle(s), emportant la dissolution sans liquidation de la structure d’origine. Dans le cadre de ces deux types d’opérations, fusion et ­scission, les membres des associations dissoutes deviennent membres de l’association issue de l’opération.

Le dernier mode de réorganisation, l’apport partiel d’actif, se distingue quant à lui de la fusion et de la scission en ce qu’il n’emporte aucune dissolution d’association, une partie de l’activité et du patrimoine d’une structure associative étant transférée à une autre, l’association d’origine demeurant et poursuivant les activités non transférées.

Définir les conditions du rapprochement

Après avoir identifié la ou les opérations à mener, l’article 9 bis de la loi du 1er juillet 1901 impose l’élaboration d’un projet de fusion, scission ou d’apport partiel d’actif se concrétisant par un traité d’apport ayant vocation à être conclu entre les associations concernées.

A ce stade, des discussions doivent être engagées entre les structures impliquées sur les incidences du projet (sort de l’actif et du passif, des contrats, des personnels, des statuts de la future structure, de l’organisation de la nouvelle gouvernance…) afin d’être en mesure de définir l’ensemble des conditions de la réorganisation envisagée.

Le projet de fusion, scission ou apport partiel d’actif doit en effet présenter tout à la fois les caractéristiques des associations participantes et, si tel est le cas, de la future association, les motifs, buts et conditions de l’opération, le cas échéant, une copie des demandes tendant à la poursuite d’une autorisation administrative, d’un agrément, d’un conventionnement ou d’une habilitation, la désignation et l’évaluation de l’actif et du passif ainsi que des engagements souscrits dont la transmission est prévue et les méthodes d’évaluation retenues.

En outre, le traité de fusion peut préciser la date de prise d’effet de l’opération. En l’absence de stipulation contraire dans le traité, la fusion, la scission ou l’apport partiel d’actif prend effet, en cas de création d’une ou de plusieurs associations nouvelles, à la date de publication au JO de la nouvelle association ou de la dernière d’entre elles, lorsque l’opération entraîne une modification statutaire soumise à une approbation administrative, à la date d’entrée en vigueur de celle-ci et, dans les autres cas, à la date de la dernière délibération ayant approuvé l’opération.

Mettre en œuvre la procédure de fusion

Une fois le traité de fusion au sens large établi, trois étapes procédurales, encadrées par des délais impératifs, doivent être observées.

Dans un premier temps, le traité de fusion doit être adopté par les « personnes chargées de l’administration » des associations concernées – le plus souvent le conseil d’administration – au moins deux mois avant la troisième étape. A cette occasion, il est opportun de mandater une personne chargée d’effectuer l’ensemble des formalités nécessaires à la fusion.

En outre, lorsque la valeur des apports est supérieure à 1 550 000 euros, un commissaire chargé de la fusion doit être désigné par les associations en vue d’établir un ­rapport sur les méthodes d’évaluation, la valeur de l’actif et du passif et les conditions financières de la fusion.

Dans un deuxième temps, le projet de fusion doit faire l’objet d’une publication par chacune des associations participantes au moins trente jours avant la troisième étape. Un avis doit être publié dans un journal d’annonces légales du département du siège social, lequel doit mentionner des informations sur l’opération envisagée : caractéristiques des associations existantes concernées par la fusion et, le cas échéant, de la nouvelle association issue de celle-ci, date d’adoption du projet de traité et date prévisionnelle de réunion des organes délibérants des associations devant statuer définitivement sur la fusion, désignation et évaluation de l’actif et du passif et des engagements souscrits dont la transmission est prévue…

De plus, au plus tard le jour de la publication de l’avis, les associations concernées par l’opération de fusion sont tenues de mettre à disposition, soit physiquement au siège social, soit sur leur site internet, certains documents, notamment le traité de fusion, la liste des associations concernées et de leurs dirigeants, les comptes annuels desdites associations, les conditions de transfert des personnels.

Troisième étape, la fusion est décidée par délibérations concordantes des associations concernées, le cas échéant après examen du rapport établi par le commissaire aux apports, dans le respect d’un délai d’au moins deux mois depuis l’adoption du traité de fusion par les « personnes chargées de l’administration » des associations (étape 1) et d’au moins trente jours à compter de la publication des avis (étape 2).

Cette décision est adoptée par les associations « dans les conditions requises par leurs statuts pour leur dissolution », cette dernière condition n’étant pas prévue pour l’apport partiel d’actif, pour lequel les délibérations doivent être adoptées « dans les conditions requises par les statuts ». En pratique, il revient souvent à l’assemblée générale (extraordinaire) dont les délibérations sont soumises à des règles de majorité et de quorum spécifiques de se prononcer.

Parallèlement, lorsque la procédure aboutit à la constitution d’une nouvelle association, le projet de statuts de cette dernière doit être approuvé par les associations vouées à disparaître en conséquence, sans que la nouvelle association n’ait besoin de se prononcer.

Connaître les effets de la fusion sur les personnels

Le transfert d’activité entre associations implique logiquement celui des contrats de travail des salariés aux associations bénéficiaires de la fusion, en application de l’article L.1224-1 du code du travail. En effet, dès lors qu’un transfert d’une entité économique autonome est constaté, les personnels directement et spécifiquement affectés à l’exercice des activités transférées sont repris par l’association bénéficiaire de la fusion.

Ce transfert s’opère de plein droit au jour de la fusion, il n’est donc pas nécessaire de recueillir l’accord des salariés, et l’association bénéficiaire ne peut opérer de choix parmi ces derniers.

Il faut préciser qu’en cas de transfert partiel d’activité dans le cadre d’une scission ou d’un apport partiel d’actif ne concernant pas l’ensemble du personnel associatif, le transfert des salariés protégés ne peut intervenir qu’après autorisation de l’inspecteur du travail en application de l’article L.2414-1 du code du travail.

D’un point de vue procédural, les associations concernées par une réorganisation employant plus de 50 salariés ont l’obligation de consulter pour avis leur ­comité social et économique en application de l’article L.2312-8 du code du travail. Par ailleurs, les contrats de travail en cours lors de la fusion doivent être maintenus dans les mêmes conditions. Cela signifie qu’ils ne peuvent être modifiés sans l’accord des salariés : est ainsi garanti le maintien de l’ancienneté, de la rémunération, de la ­qualification et de la durée du travail.

Régler les autres incidences de la fusion

Puisque l’association bénéficiaire de la fusion a vocation à poursuivre en tout ou partie l’activité des associations fusionnées, elle bénéficie du transfert du patrimoine correspondant des associations existantes vers l’association bénéficiaire de la fusion, ce qui comprend tout ou partie de leur actif (trésorerie, biens immobiliers et mobiliers…) et de leur passif (emprunts en cours, autres dettes…).

S’agissant des contrats en cours au moment de la fusion, en cas de transfert de l’ensemble de l’activité, l’association bénéficiaire de la fusion se voit transférer l’ensemble des droits et obligations des associations fusionnées, en ce compris les contrats, sauf ceux conclus ­intuitu personae, comme les conventions de subventionnement.

En cas d’apport partiel d’activité, seuls le patrimoine et les droits et obligations correspondant à la partie de l’activité transférée sont repris par l’association bénéficiaire de la fusion, ce qui peut poser difficulté, en pratique, pour certains contrats « transversaux » ou pour procéder au partage de la trésorerie.

Se pose également la question de l’incidence de la fusion sur les autorisations administratives/agréments/habilitations dont disposent les associations fusionnées. En l’absence de disposition organisant leur maintien au bénéfice de l’association bénéficiaire de la fusion, une appréciation pour chaque autorisation/agrément/habilitation doit être réalisée, afin de déterminer s’il existe un risque que la fusion puisse les remettre en cause.

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