L’on se souvient que la loi ALUR avait, dans un souci de sécurité juridique, tenté d’enserrer dans le temps les possibilités de contestation des décisions de préemption par les tiers. Pour le vendeur, il est acquis que le délai de recours contentieux court à compter de la notification de la décision de préemption ; encore faut-il que cette dernière mentionne, en application de l’article R. 421-5 du Code de justice administrative, les voies et délais de recours. Au reste, la véritable difficulté tient dans le délai de recours offert, d’une part, aux acquéreurs évincés, et d’autre part, aux tiers susceptibles de justifier d’un intérêt à agir à l’encontre de la décision de préemption (comme une association de contribuables locaux : CE, 1er juillet 2009, Association La Fourmi Vouvrillonne, n° 319238). Pour les premiers, le délai de recours ne peut courir qu’à compter de la notification à leur égard (CE, 30 juillet 1997, Commune de Montrouge, n° 167574) de la décision de préemption ; en l’absence d’une telle formalité (par méconnaissance ou en raison du silence de la DIA), la décision de préemption pouvait être attaquée sans délai. Dans le même sens, les tiers, en l’absence de mesure de publicité, pouvaient également saisir la Juridiction administrative, sans limite de temps. L’insécurité juridique était donc grande.
Le législateur s’est efforcé d’y remédier, à l’occasion de la loi ALUR. En premier lieu, il a imposé la pratique de la notification au vendeur, au notaire et « le cas échéant, à la personne mentionnée dans la déclaration d’intention d’aliéner qui avait l’intention d’acquérir le bien » (art. L. 213-2 du Code de l’urbanisme). Ce faisant, la loi ALUR n’innove pas spécialement et ne règle pas, surtout, le cas de l’acquéreur évincé dont l’identité n’est pas connue. C’est bien pour autant qu’il est désormais prévu une obligation de publication de la décision de préemption pour faire courir le délai de recours vis-à-vis des tiers (et donc vis-à-vis de l’acquéreur évincé inconnu). L’efficacité du mécanisme institué dépendra de la capacité du titulaire du droit de préemption à justifier de la publication effectuée (par un certificat d’affichage du Maire ou du Président de l’EPCI compétent notamment), ce dernier étant réalisé dans les locaux de la collectivité titulaire et, par prudence, en Mairie du lieu de l’immeuble.
La Cour administrative d’appel de Versailles a, dans une décision n° 16VE03841 rendue le 7 février 2019 (classée en C +), considéré que « lorsqu’elle fait l’objet d’un affichage destiné aux tiers, cette décision de préemption doit, compte tenu de son objet, être affichée pendant une durée de deux mois« . Or en l’espèce la décision de préemption attaquée avait fait l’objet d’un affichage en Mairie de 15 jours. Ce délai était, pour la Cour, « insuffisant pour faire courir le délai de records contentieux à l’encontre de la décision attaquée. Dans la mesure où la décision de préemption contestée a été affichée dans des conditions irrégulières, celles-ci ont fait obstacle au déclenchement du délai de recours contentieux« .
Les titulaires du DPU sont donc clairement invités à procéder à un affichage d’une durée de deux mois et à le faire constater, sauf à s’exposer à un recours formé plusieurs mois après l’intervention de la décision de préemption par un tiers.
Le pôle Urbanisme du Cabinet