Avis du Conseil d’Etat sur l’interprétation de l’article L. 174-6 du Code de l’urbanisme, relatif à la remise en vigueur des POS

Jurisprudence 5 mai 2020

Dans un  avis n° 436549 en date du 3 avril 2020 (qui sera mentionné au Tables du Recueil), le Conseil d’Etat, saisi par le Tribunal administratif de Poitiers sur le fondement des dispositions de l’article L. 113-1 du Code de justice administrative, a été amené à préciser les conditions dans lesquelles la « résurrection provisoire » (pour reprendre les termes du rapporteur public Stéphane HOYNCK dans ses conclusions sous cet avis) des POS devait s’opérer en application de l’article L. 174-6 du Code de l’urbanisme tel que modifié par la loi ELAN.

Bref rappel historique

L’on rappellera brièvement que dans le cadre de la loi ALUR (loi n° 2014-366 du 24 mars 2014), le principe de la « caducité » des POS a été posé ; l’idée était alors, concrètement, que les POS non transformés en PLU avant le 31 décembre 2015 et les POS dont la transformation en PLU a été prescrite avant le 1 janvier 2016, mais non encore transformés au 27 mars 2017, devenaient automatiquement caducs.

L’on se souvient également que par une ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015, une exception à ce principe de caducité a été posée, l’article L. 174-6 du Code de l’urbanisme prévoyant que si un PLU était annulé ou déclaré illégal après l’échéance de la caducité des POS, le POS immédiatement antérieur au document invalidé pouvait être remis en vigueur. Or, cette encoche au principe de la caducité des POS a rapidement révélé ses limites, en ce que, d’une part, l’ancien POS ressuscitait sans aucune limitation de durée et, d’autre part, en ce que pendant un délai de deux ans suivant la décision du Juge (d’annulation ou de déclaration d’illégalité du PLU), le POS pouvait même être révisé (il pouvait donc évoluer) alors qu’il était acquis que cet outil de planification ne répondait plus aux attentes (en matière environnementale notamment) issues des lois  SRU, Grenelle II ou encore ALUR.

C’est en cet état que le législateur a décidé, dans le cadre de la loi ELAN, d’acter définitivement la disparition des POS en procédant à une réécriture de l’article L. 174-6 du Code de l’urbanisme. Ainsi a-t-il été prévu :

  • d’une part, que la remise en vigueur transitoire du POS était limitée à une durée de 24 mois à compter de la date de l’annulation du document d’urbanisme ou de la déclaration d’illégalité ;
  • d’autre part, que le POS remis en vigueur ne pourrait plus faire l’objet, comme auparavant, d’une quelconque procédure d’évolution ;
  • et, enfin, dans un troisième – et nouvel – alinéa, qu’à défaut de PLU ou de carte communale exécutoire à l’issue de cette période, le RNU s’appliquerait sur le territoire communal concerné.

Questions soulevées

Invité à faire application de ces dispositions (qui faisaient l’objet de discussions ; voir pour la position de la doctrine administrative qui estimait que le délai de 24 mois pendant lequel le POS pouvait renaitre courait à compter de l’annulation du PLU : Rép. Min. n° 13858 : JOAN 5 mars 2019, p. 2120), le Tribunal administratif de Poitiers, qui était confronté en l’espèce à un refus de permis de construire délivré le 9 janvier 2019 (après l’entrée en vigueur de la loi ELAN) et un POS remis en vigueur suite à l’annulation d’un PLU (intervenue antérieurement à l’entrée en vigueur de cette loi), a donc interrogé le Conseil d’Etat à deux titres :

« 1°) Le délai de caducité des plans d’occupation des sols remis en vigueur du fait d’une annulation, prévu par l’article L. 174-6 du code de l’urbanisme au terme de vingt-quatre mois, est-il applicable lorsque l’annulation d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale est intervenue avant le 25 novembre 2018, date d’entrée en vigueur de la loi ELAN ? » ;

2°) Dans l’affirmative, le délai de vingt-quatre mois doit-il commencer à courir à compter de l’annulation du plan local d’urbanisme, du document d’urbanisme en tenant lieu ou de la carte communale, ou du jour de l’entrée en vigueur de la loi ELAN ? ».

L’avis du Conseil d’Etat

Aux termes de son avis, le Conseil d’Etat, après avoir relevé que « les dispositions de l’article 34 de la loi du 23 novembre 2018 modifiant l’article L. 174-6 du code de l’urbanisme sont, en l’absence de dispositions expresses contraires, immédiatement applicables et sont entrées en vigueur le 25 novembre 2018, un jour après la publication de la loi au Journal Officiel », a précisé que :

« eu égard à l’objet et aux termes mêmes de l’article L. 174-6 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 23 novembre 2018, qui ne prévoit aucune rétroactivité, le délai de vingt-quatre mois qu’il prévoit, qui est immédiatement applicable, y compris lorsque la décision prononçant l’annulation ou la déclaration d’illégalité d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale est intervenue avant son entrée en vigueur, ne commence à courir, pour les plans d’occupation des sols remis en vigueur par des annulations prononcées avant l’entrée en vigueur de la loi, qu’à la date de son entrée en vigueur ».

Ainsi posé, comme a pu l’exposer le Rapporteur public dans ses  conclusions, « ce n’est donc que dans un délai de 24 mois à compter de l’entrée en vigueur de la  loi, soit le 25 novembre 2020, que de tels POS sont susceptibles de sortir de vigueur, de sortir de vigueur… une dernière fois ».

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