Dans une décision du 25 janvier 2023 (n°445937), à mentionner aux tables du recueil Lebon, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur l’intérêt à agir requis pour contester une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation du sol régie par le Code de l’urbanisme.
En l’espèce, les sociétés Lowima et Touche Automobiles, avaient chacune fait connaître leur intérêt pour l’acquisition d’une parcelle que la communauté de communes Aunis Atlantique (CCAA) entendait mettre en vente.
Cette collectivité a informé les deux sociétés qu’elle entendait céder la parcelle à la société Lowima.
Par une délibération du 26 septembre 2018, le conseil communautaire de la CCAA a fixé le prix du mètre carré de la parcelle. La société Touche Automobiles lui a adressé une offre d’achat de cette parcelle à ce prix. Puis la même société a fait assigner la CCAA aux fins de voir juger parfaite la vente de la parcelle à son profit
Par une délibération du 2 juillet 2019, le conseil communautaire a formalisé sa décision de vendre à la société Lowima et, par un arrêté, le maire de la commune de Marans a délivré à cette dernière un permis de construire.
Le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande de la société Touche Automobiles d’annuler pour excès de pouvoir le permis de construire ainsi délivré.
Par une ordonnance contre laquelle la société Touche Automobiles se pourvoit en cassation, la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté l’appel qu’elle a formé contre ce jugement.
Ainsi saisi, le Conseil d’Etat commence par rappeler les dispositions de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme.
Aux termes de cet article :
“Une personne autre que l’Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n’est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l’aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien qu’elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d’une promesse de vente, de bail, ou d’un contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation.”
Le Conseil d’Etat rappelle ensuite qu’aux termes de l’article R. 600-4 du même code :
“Les requêtes dirigées contre une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le présent code doivent, à peine d’irrecevabilité, être accompagnées du titre de propriété, de la promesse de vente, du bail, du contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation, du contrat de bail, ou de tout autre acte de nature à établir le caractère régulier de l’occupation ou de la détention de son bien par le requérant.”
Pour le Conseil d’Etat, il résulte de ces dispositions que
“la contestation d’une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation du sol régie par le code de l’urbanisme est ouverte aux personnes physiques ou morales qui justifient de leur qualité d’occupant régulier ou de propriétaire d’un bien immobilier dont les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance sont de nature à être directement affectées par le projet.
Une personne, entendant agir comme propriétaire d’un tel bien, qui ne fait état ni d’un acte de propriété, ni d’une promesse de vente, ni d’un contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation ne justifie pas d’un intérêt de nature à lui donner qualité pour demander l’annulation d’une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation du sol régie par le code de l’urbanisme, sauf à ce qu’elle puisse sérieusement revendiquer la propriété de ce bien devant le juge compétent.”
Ainsi, n’a pas intérêt à agir contre une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation du sol régie par le code de l’urbanisme, la personne qui ne fait état ni d’un acte de propriété, ni d’une promesse de vente, ni d’un contrat préliminaire sur le bien affecté par le projet, sauf à ce qu’elle puisse sérieusement en revendiquer la propriété devant le juge compétent.
En l’espèce le Conseil d’Etat juge que la cour administrative d’appel n’a ni commis d’erreur de droit, ni inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant que “la simple présentation d’une offre pour le terrain d’assiette du projet suivie de l’engagement d’une action devant le juge civil, lesquels ne sauraient faire regarder la société Touche Automobiles comme pouvant sérieusement revendiquer la propriété de ce terrain, ne pouvaient fonder l’intérêt de la société Touche Automobiles à contester la légalité du permis litigieux.”