Cette ordonnance constitue l’une des premières mises en oeuvre de la nouvelle doctrine du Conseil d’Etat en matière de proportionnalité des mesures de police (Cf. ordonnances rendues le 6 septembre 2020).
La question essentielle que la requête en référé-liberté présentait à juger était la suivante : l’arrêté de police du Préfet des Hauts-de-Seine rendant le port du masque obligatoire sur le territoire de tout le département est-il proportionné au but sanitaire poursuivi – dans les circonstances de l’espèce – ?
Plus spécialement, la nouvelle marge de manoeuvre offerte au pouvoir de police par le Conseil d’Etat, via la prise en compte pour l’appréciation du caractère proportionné de la mesure, des objectifs de simplicité et lisibilité, permet-elle de justifier que le port du masque soit imposé dans le périmètre de l’ensemble du département ?
Aux termes de son ordonnance, le juge des référés du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise répond par la négative.
S’il admet, reprenant sur ce point les termes du Conseil d’Etat, que le préfet peut légalement imposer le port du masque sur une partie de la voie publique et dans les lieux ouverts au public du département, « tout en délimitant des zones suffisamment larges pour englober de façon cohérente les points du territoire caractérisées par une forte densité de personnes ou une difficulté à assurer le respect de la distance physique« , il juge cependant que la circonstance que « le département des Hauts-de-Seine est le deuxième département français au regard de la densité de la population, avec une moyenne d’un peu plus de 9000 habitants au kilomètre carré, (…) ne saurait être regardée comme manifestement suffisante pour justifier une obligation générale de port du masque sur l’ensemble des voies publiques du département, sans aucune prise en compte ni des caractéristiques des différents territoires communaux, ni des zones non caractérisées par une forte densité sur l’espace public. » Pour ce motif déjà il considère que le préfet a porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’aller et venir et à la liberté personnelle.
On portera par ailleurs à l’attention des amateurs de sport que le juge des référés a considéré que le préfet, qui avait exempté du port du masque les joggeurs et cyclistes, aurait dû prévoir une exception plus large « pour l’ensemble des personnes pratiquant des activités physiques et sportives en plein air« . En s’abstenant de le faire il est jugé qu’il a porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’aller et venir et à la liberté personnelle.
La décision commentée est intéressante ensuite en ce qu’elle guide ensuite l’autorité de police pour la délimitation des zones concernées par la mesure. Elle invite ainsi le Préfet à « délimiter des zones cohérentes englobant les points du territoire caractérisés par une forte densité de personnes sur l’espace public, du fait par exemple de l’existence de zones commerciales ou d’activité denses,de la proximité d’une gare ou de la présence d’un autre équipement public drainant de nombreuses personnes. », ou à identifier une ou des zone(s) exemptée(s) de l’obligation de port du masque.
Il faut enfin souligner qu’eu égard à l’exigence de lisibilité et de cohérence l’obligation de porter le masque à toute heure n’a pas été jugée disproportionnée.