La Chambre criminelle de la Cour de cassation a, dans un arrêt du 3 décembre 2019 (qui sera publié au Bulletin), rendu une décision qui intéressera les praticiens du droit de l’urbanisme sur trois points.
Les faits étaient, comme souvent en la matière, d’une grande banalité. Une commune avait délivré un permis de construire une maison comprenant deux logements mais il s’est avéré que trois logements avaient été, en fait, réalisés. Or, la réalisation d’un troisième logement imposait, en application des dispositions du plan local d’urbanisme, la réalisation de onze places de stationnement (seuls six avaient été prévus).
L’arrêt de la Cour de cassation, qui rejette le pourvoi formé à l’encontre de l’arrêt de la Cour d’appel de Grenoble, est intéressant sur trois points.
D’abord, la décision commentée précise que « ni la déclaration d’achèvement de conformité des travaux ni l’attestation certifiant que la conformité des travaux avec le permis n’a pas été contestée (…) n’ont (…) d’effet sur l’action publique ». L’absence de contestation par la Commune de la régularité des travaux réalisés ne ferait donc pas obstacle à ce que des poursuites pénales soient engagées.
Ensuite, la Cour de cassation approuve le raisonnement suivi par les Juges du fond qui ont, contrairement aux premiers juges, estimé que l’infraction d’exécution de travaux en violation des dispositions du règlement du plan local d’urbanisme était caractérisée. Pour le constructeur, la Cour s’était méprise de l’avoir déclaré coupable du délit d’exécution de travaux en violation du règlement du PLU pour ne pas avoir réalisé onze places de stationnement ; le constructeur estimait notamment que « la construction d’un logement illicite, ou dont la licéité est contestée, ne peut constituer le présupposé d’une obligation juridiquement sanctionnée » et que la Cour d’appel, en faisant référence aux trois logements irrégulièrement construits, n’avait justifié sa décision. Mais en vain. Pour la Cour de cassation, la Cour d’appel n’a pas commis d’erreur « dès lors que les éléments matériels de la violation du permis délivré et de celle de la violation du plan étaient distincts ».
Enfin, si la procédure suivie devant la Cour d’appel était critiquée au motif qu’en application de l’article L. 480-5 du Code de l’urbanisme, les juges correctionnels ne pouvaient statuer sur la mise en conformité de l’ouvrage, sa démolition ou le rétablissement des lieux en leur état antérieur qu’au vu des observations écrites ou après audition du maire ou du fonctionnaire compétent, la Cour de cassation répond sur ce point que « la cour d’appel (…) n’était pas tenue d’entendre elle-même le représentant de l’administration dès lors que cette audition avait déjà eu lieu en première instance, les conclusions de partie civile constituant les observations exigées par l’article L. 480-5 du code de l’urbanisme ». A cet égard, l’on rappellera que la Cour de cassation avait déjà estimé, alors qu’était discutée l’efficacité d’une audition, à hauteur d’appel, d’un représentant de la Commune (partie civile), que « constituent les observations écrites exigées par l’article L. 480-5 du code de l’urbanisme, les conclusions dans lesquelles le maire, représentant la commune partie civile, demande la mise en conformité des lieux ou la démolition de l’ouvrage » (Crim., 3 novembre 2010, n° 09-87.968). La décision commentée s’inscrit dans cette veine jurisprudentielle, d’une très grande importance en pratique…