Dans un arrêt du 2 juin 2023, à mentionner aux tables du recueil Lebon (n°449820), le Conseil d’Etat se prononce sur les modalités d’application dans le temps des plans d’occupation des sols et plans locaux d’urbanisme.
En l’espèce, le maire de Saint-Laurent-du-Var a délivré en 1959 à M. A un permis de construire portant sur une parcelle de 5 078 m2.
- A a exercé sur cette parcelle une activité de concassage, qu’il avait déclarée le 15 avril 1958, avant de créer, en 1973, une société dédiée à cette activité, à laquelle il a consenti un bail commercial. En 2013, un bail est consenti, par la fille de M. A, à une société automobile pour un usage de bureaux, de dépôt et de parc de matériel et de véhicules.
Le maire de Saint-Laurent-du-Var fait alors savoir à cette société que son utilisation du terrain en cause, situé dans une zone agricole, n’était pas conforme aux prescriptions du plan local d’urbanisme approuvé le 21 juin 2013. La société automobile a alors résilié son contrat de bail.
Le Tribunal administratif a rejeté la demande de Mme A tendant à la condamnation de la commune de Saint-Laurent-du-Var à lui verser la somme de 127 862 euros, en réparation du préjudice qu’elle estime avoir subi du fait de cette résiliation. Puis par un arrêt du 17 décembre 2020 contre lequel Mme A se pourvoit en cassation, la cour administrative d’appel a rejeté son appel formé contre ce jugement.
Aux termes de l’article L. 123-1-2 du Code de l’urbanisme, relatif aux plans locaux d’urbanisme, alors en vigueur : “le règlement fixe, en cohérence avec le projet d’aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d’utilisation des sols […] qui peuvent notamment comporter l’interdiction de construire, délimitent les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger et définissent, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l’implantation des constructions.
A ce titre, le règlement peut :
1° Préciser l’affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être fait ou la nature des activités qui peuvent y être exercées ;
2° Définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées”.
Pour le Conseil d’Etat, il résulte de ces dispositions que “les règlements des plans locaux d’urbanisme peuvent fixer, au titre de l’affectation des sols, la nature des activités susceptibles d’être exercées dans certaines zones.”.
En l’espèce, le permis de construire délivré à M. A en 1959 autorisait seulement la construction d’un immeuble comprenant, au rez-de-chaussée, “un atelier, des bureaux et des vestiaires-lavabos” et, au premier étage, “deux appartements”.
Le Conseil d’Etat juge ainsi que si le titulaire d’un permis de construire tient de celui-ci des droits qui ne sauraient être affectés par les dispositions d’un plan local d’urbanisme entrées en vigueur postérieurement à sa date de délivrance, ne méconnaît pas les droits que la requérante tient de ce permis de construire le courrier par lequel le maire indiquait à une société que le stationnement, sur le terrain appartenant à la requérante et indépendamment de la construction autorisée par le permis de construire, de nombreux bus et autres véhicules, au titre de son activité économique de transport, était contraire aux dispositions du règlement du plan local d’urbanisme limitant l’affectation des sols dans cette zone à l’exercice d’activités agricoles.
Dès lors, la Cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que “que le courrier par lequel le maire indiquait à la société automobile de Provence Kéolis que le stationnement, sur le terrain appartenant à Mme A et indépendamment de la construction autorisée par le permis de construire du 17 août 1959, de nombreux bus et autres véhicules, au titre de son activité économique de transport, était contraire aux dispositions de l’article 2 A du règlement du plan local d’urbanisme limitant l’affectation des sols dans cette zone à l’exercice d’activités agricoles n’avait pas méconnu les droits que Mme A tenait de ce permis de construire, ni porté atteinte au principe général de non-rétroactivité des actes administratifs”.