L’article 209 de la loi dite 3DS (loi n°2022-217 du 21 février 2022 relative la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale) permettait une dérogation temporaire aux principes de mise à disposition des fonctionnaires.
Cette dérogation pouvant s’étendre sur une durée de 5 ans à compter de la publication d’un décret d’application, qui vient de paraître.
A été publié au JORF du 28 décembre 2022 le décret n°2022-1682 du 27 décembre 2022 relatif à l’expérimentation de la mise à disposition de fonctionnaires dans le cadre d’un mécénat de compétences.
Ce décret, entré en vigueur au lendemain de sa publication, met en place l’expérimentation de la mise à disposition de fonctionnaires dans le cadre d’un mécénat de compétences.
L’article 209 de la loi susmentionnée prévoit en effet, par dérogation aux articles L. 512-8, L. 512-13 et L. 512-15 du code général de la fonction publique et pour une durée de cinq ans à compter de la publication du décret en Conseil d’Etat, que :
“les fonctionnaires de l’Etat, des communes de plus de 3 500 habitants, des départements, des régions et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre peuvent être mis à la disposition de personnes morales relevant des catégories mentionnées au a du 1 de l’article 238 bis du code général des impôts ainsi que de fondations ou d’associations reconnues d’utilité publique, pour la conduite ou la mise en œuvre d’un projet répondant aux missions statutaires de la personne morale, de la fondation ou de l’association et pour lequel leurs compétences et leur expérience professionnelles sont utiles.”
Le décret d’application devait notamment préciser “le contenu et les modalités de l’évaluation ainsi que les règles selon lesquelles les administrations de l’Etat et les collectivités territoriales concernées informent les services du ministre chargé de la fonction publique de la mise en œuvre du dispositif”.
La loi 3DS précisait déjà à l’article 209 que la mise à disposition ne peut excéder une durée de dix-huit mois, renouvelable dans la limite d’une durée totale de trois ans.
Quant au contenu du décret :
Qui prononce la mise à disposition ?
L’article 2 du décret dispose que :
“la mise à disposition est prononcée, après accord de l’intéressé et de l’organisme d’accueil, par arrêté du ministre lorsqu’il s’agit d’un fonctionnaire de l’Etat ou par arrêté de l’autorité territoriale investie du pouvoir de nomination lorsqu’il s’agit d’un fonctionnaire territorial”.
Dans le cas d’un fonctionnaire territorial, “l’assemblée délibérante de la collectivité territoriale ou de l’établissement public gestionnaire en est préalablement informée”.
Pour quelle quotité de temps de travail la mise à disposition peut-elle être prononcée ?
L’article 3 du décret dispose que “La mise à disposition du fonctionnaire peut porter sur tout ou partie de la durée de son temps de service”.
Que doit contenir la convention de mise à disposition ?
L’article 4 du décret dispose que “toute mise à disposition fait l’objet d’une convention établie entre l’administration d’origine et la personne morale bénéficiaire. La convention, qui est communiquée au fonctionnaire, peut porter sur la mise à disposition d’un ou plusieurs fonctionnaires”.
La convention doit définir :
- La nature des activités exercées par le fonctionnaire mis à disposition ;
- La durée de la mise à disposition ;
- Les conditions d’emplois et de gestion administrative du fonctionnaire au sein de l’organisme d’accueil, notamment le lieu et la durée du travail ainsi que, le cas échéant, les modalités de remboursement des frais de mise à disposition ;
- Les conditions et modalités de renouvellement de la mise à disposition ainsi que de fin anticipée de la mise à disposition.
Elle doit rappeler, “les obligations auxquelles le fonctionnaire mis à disposition est soumis au titre des articles L. 121-1 à L. 121-11 du code général de la fonction publique.
Lorsque la mise à disposition ne donne pas lieu à remboursement, la convention comprend les éléments requis par l’article 10 de la loi du 12 avril 2000 susvisée”.
Toute modification ou prolongation de la mise à disposition doit intervenir dans le respect de l’article 2 précité et donner lieu à un avenant.
Quelles sont les modalités de fin anticipée de la mise à disposition ?
L’article 5 du décret différencie la procédure selon qu’il s’agisse d’un fonctionnaire de l’Etat ou d’un fonctionnaire territorial.
Pour un fonctionnaire de l’Etat, sa mise à disposition “peut prendre fin avant le terme prévu par arrêté du ministre, sur demande de l’administration d’origine, de l’organisme d’accueil ou du fonctionnaire, dans le respect des règles de préavis prévues dans la convention de mise à disposition.
Lorsque cesse la mise à disposition, le fonctionnaire de l’Etat qui ne peut être affecté aux fonctions qu’il exerçait précédemment dans son service d’origine reçoit une affectation dans l’un des emplois que son grade lui donne vocation à occuper, dans le respect des dispositions de l’article L. 512-19 du code général de la fonction publique”.
Pour un fonctionnaire territorial, sa mise à disposition “ peut prendre fin avant le terme prévu par arrêté de l’autorité territoriale investie du pouvoir de nomination, sur demande de la collectivité territoriale ou de l’établissement public d’origine, de l’organisme d’accueil ou du fonctionnaire, dans le respect des règles de préavis prévues dans la convention de mise à disposition.
Lorsque cesse la mise à disposition, le fonctionnaire territorial qui ne peut être affecté aux fonctions qu’il exerçait précédemment dans son service d’origine reçoit une affectation dans l’un des emplois que son grade lui donne vocation à occuper, dans le respect des dispositions de l’article L. 512-28 du code général de la fonction publique”.
Enfin, qu’il s’agisse d’un fonctionnaire de l’Etat ou d’un fonctionnaire territorial “en cas de faute disciplinaire, il peut être mis fin sans préavis à la mise à disposition par accord entre l’administration d’origine et l’organisme d’accueil”.
Quelles sont les autres modalités de la mise à disposition ?
L’article 6 du décret dispose tout d’abord que “l’organisme d’accueil transmet à l’administration d’origine les informations relatives aux congés annuels et aux congés de maladie régis respectivement par les articles L. 621-1 et L. 822-1 du code général de la fonction publique”.
Ensuite il est prévu que “sans préjudice d’un éventuel complément de rémunération dûment justifié, versé selon les règles applicables aux agents exerçant leurs fonctions dans l’organisme d’accueil, le fonctionnaire mis à disposition peut être indemnisé par l’organisme d’accueil des frais et sujétions auxquels il s’expose dans l’exercice de ses fonctions suivant les règles en vigueur dans cet organisme”.
De plus, “l’organisme d’accueil supporte les dépenses occasionnées par les actions de formation dont il fait bénéficier le fonctionnaire”.
Enfin, “l’autorité compétente de l’administration d’origine exerce le pouvoir disciplinaire à l’encontre du fonctionnaire mis à disposition, le cas échéant, sur saisine de l’organisme d’accueil”.
Comment va être évaluée l’expérimentation ?
L’article 7 du décret prévoit, afin de permettre l’évaluation de l’expérimentation, “un bilan annuel de la mise à disposition des fonctionnaires dans le cadre du mécénat de compétences est établi par chaque employeur public concerné”.
Ce bilan doit comporter, pour chaque employeur public :
- Un état des fonctionnaires mis à disposition précisant leur grade et qualité, l’objet de la mise à disposition, sa durée et son coût et, le cas échéant, son caractère renouvelable, ainsi que l’organisme bénéficiaire ;
- La liste des structures bénéficiaires précisant, pour chacune, ses missions statutaires, le projet ayant justifié la mise à disposition, ainsi que le nombre de fonctionnaires mis à disposition de chaque structure.
Pour les fonctionnaires de l’Etat, le “bilan est transmis au ministre chargé de la fonction publique.
Lorsque l’employeur est un établissement public administratif de l’Etat, ce bilan est également transmis aux ministres de tutelle.”
Pour les “fonctionnaires des collectivités territoriales, ce bilan est transmis au préfet.
Le ministre chargé de la fonction publique établit annuellement une synthèse globale de la mise en œuvre de l’expérimentation. Elle fait l’objet d’une présentation au conseil commun de la fonction publique.”
L’article 8 du décret dispose qu’une première évaluation doit être établie au plus tard à la fin du premier semestre 2025.
“A cette fin, les bilans annuels prévus à l’article 7 sont transmis avant le 31 mars 2025.
Le dernier bilan est établi au plus tard un an avant la date prévue pour le terme de l’expérimentation. Il fait l’objet d’une présentation au conseil commun de la fonction publique.”
En outre, le ministre chargé de la fonction publique doit rendre un rapport d’évaluation.
“Il comporte une synthèse des bilans annuellement réalisés. Il évalue l’expérimentation pour la fonction publique de l’Etat et pour la fonction publique territoriale et précise les éventuelles difficultés rencontrées”.