Voici un arrêt éclairant cette compétence à l’occasion d’un dossier suivi par notre associé Philippe Peynet, qui assistait l’EPT intervenant volontaire dans cette affaire.
Par cet arrêt rendu le 7 décembre 2023 (n° 22PA05283), classé en C+, la Cour administrative d’appel de Paris a annulé une ordonnance du Président du Tribunal administratif de Montreuil qui avait rejeté un recours formé à l’encontre d’une décision du Maire, refusant d’introduire une action en démolition devant le Juge judiciaire.
Plus précisément, un habitant se plaignait de la réalisation, sur un terrain riverain du sien, de travaux sans autorisation. Il avait alors demandé à la Commune, par ailleurs membre d’un Etablissement public territorial (EPT) de saisir le Juge judiciaire sur le fondement de l’article L. 480-14 du Code de l’urbanisme et de solliciter la démolition, sous astreinte, des ouvrages irrégulièrement édifiés.
Cette demande a toutefois été tacitement rejetée par le Maire, puis déférée au Tribunal administratif de Montreuil.
Le Président du Tribunal administratif avait cependant rejeté par voie d’ordonnance (en application de l’article R. 222-1, 7°, du Code de justice administrative), la requête en considérant que l’EPT, compétent en matière de PLU, était seul compétent pour saisir le Juge judiciaire sur le fondement de l’article L. 480-14 du Code de l’urbanisme. La demande adressée à la Commune était donc mal dirigée.
Dans son arrêt du 7 décembre 2023 la Cour administrative d’appel de Paris a censuré cette analyse et a jugé – en rejoignant sur ce point l’appréciation de la Cour de cassation (Civ. 3e, 21 janvier 2021, Communauté de communes Grand Saint-Emilionnais, Commune de Lussac, n° 20-10.602, publié au bulletin 1/2021, p. 401) – que « quand bien même la compétence relative au plan local d’urbanisme a été transférée à un établissement public de coopération intercommunale, les dispositions précitées du code de l’urbanisme n’ont pas pour objet ni pour effet d’exclure que le maire de la commune, au demeurant compétent pour la délivrance des autorisations d’urbanisme et chargé de l’exécution des lois et règlements en vertu des dispositions de l’article L. 2122-7 du code général des collectivités locales, puisse saisir le tribunal judiciaire en vue de faire ordonner la démolition ou la mise en conformité d’un ouvrage édifié ou installé sans l’autorisation exigée« .
Même en cas de transfert de sa compétence en matière de PLU (à un EPT en l’espèce mais la solution est transposable en cas de transfert à un EPCI), une Commune demeure donc compétente pour saisir le Juge judiciaire d’une action en démolition. Elle conserve par conséquent cette prérogative, étroitement associée à son pouvoir de police en matière d’urbanisme.
Et de fait, le Maire est souvent bien placé pour apprécier si des travaux ont été réalisés sans aucune autorisation d’urbanisme ou en méconnaissance d’une autorisation qu’il a, bien souvent, délivré.
La solution rendue par la Cour doit donc être approuvée.