La société Eolarmor avait déposé une demande de permis de construire, refusé par un arrêté du 6 juin 2014.
Le tribunal administratif de Rennes avait annulé cette décision de refus et enjoint au maire de prendre une nouvelle décision. La commune a relevé appel de ce jugement devant la cour administrative d’appel de Nantes.
A la suite d’un protocole transactionnel entre la commune et la société Eolarmor, la commune s’était désistée de l’appel qu’elle avait formé. L’ordonnance du Tribunal administratif de Rennes annulant le permis de construire est par suite devenue définitive.
La société avait alors confirmé sa demande de permis de construire et le maire a délivré le permis sollicité.
Deux associations ont saisi le tribunal administratif de Rennes d’un recours tendant à l’annulation pour excès de pouvoir de ce permis.
Le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.
Par un arrêt du 20 octobre 2020, contre lequel la société Eolarmor se pourvoit en cassation, la cour administrative d’appel de Nantes a annulé ce jugement et le permis de construire.
Elle a en effet jugé que « la demande présentée par la société Eolarmor ne pouvait être considérée comme une confirmation de sa demande d’autorisation initiale au sens et pour l’application des dispositions de l’article L. 600-2 du code de l’urbanisme »
Aux termes de cet article : “Lorsqu’un refus opposé à une demande d’autorisation d’occuper ou d’utiliser le sol ou l’opposition à une déclaration de travaux régies par le présent code a fait l’objet d’une annulation juridictionnelle, la demande d’autorisation ou la déclaration confirmée par l’intéressé ne peut faire l’objet d’un nouveau refus ou être assortie de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d’urbanisme intervenues postériurement à la date d’intervention de la décision annulée sous réserve que l’annulation soit devenue définitive et que la confirmation de la demande ou de la déclaration soit effectuée dans les six mois suivant la notification de l’annulation au pétitionnaire”.
Dans un arrêt du 14 décembre 2022*, le Conseil d’Etat a jugé que cet article, qui a un caractère dérogatoire, est d’interprétation stricte. Dès lors il a confirmé l’appréciation de la Cour administrative d’appel, la modification d’un projet dépassant de simples ajustements ponctuels ne peut être considérée comme une confirmation de la demande d’autorisation initiale au sens et pour l’application de l’article L. 600-2 du Code de l’urbanisme.
Une telle demande doit être considérée comme portant sur un nouveau projet et être appréciée au regard des règles d’urbanisme en vigueur à la date de cette nouvelle demande.
Le Conseil d’Etat est ensuite revenu sur les dispositions de l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme, qui organise les possibilités de régularisation de l’autorisation d’urbanisme en cours d’instance.
Pour le Conseil d’Etat il ressort de ces dispositions que “lorsque le ou les vices affectant la légalité de l’autorisation d’urbanisme dont l’annulation est demandée sont susceptibles d’être régularisés, le juge doit surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation”.
Dans l’hypothèse où le juge ne fait pas usage de cette obligation il doit être regardé comme ayant « implicitement mais nécessairement estimé que l’un au moins des vices affectant la légalité du permis de construire était insusceptible d’être régularisé ».
Dès lors qu’il n’est pas saisi par ailleurs d’une demande de régularisation, le juge n’a pas à motiver ce refus de surseoir à statuer.
*Conseil d’Etat, 14 décembre 2022, n° 448013, à publier au recueil Lebon