Permis de construire, mesure de régularisation et mise en œuvre des articles L. 600-5, L. 600-5-1 et L. 600-5-2 du Code de l’urbanisme devant le Juge d’appel

Jurisprudence 25 février 2019

Dans une récente décision qui sera publiée au Recueil (disponible sur la base de jurisprudence ArianeWeb), le Conseil d’Etat précise les modalités d’application, d’une part, du nouvel article L. 600-5-2 et, d’autre part, des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme en cas d’appel à l’encontre d’un jugement prononçant l’annulation partielle d’un permis de construire en vue de permettre une régularisation. Il se prononce également sur les règles non prises en compte par l’administration lors de la délivrance d’un permis de construire (CE, Sect., 15 février 2019, Commune de Cogolin, n° 401384).

Le premier apport de la décision porte sur le nouvel article L. 600-5-2 du Code de l’urbanisme (qui généralise une solution jurisprudentielle : CE, 19 juin 2017, Syndicat des copropriétaires de la résidence Butte Stendhal, n° 398531) qui prévoit que « lorsqu’un permis modificatif, une décision modificative ou une mesure de régularisation intervient au cours d’une instance portant sur un recours dirigé contre le permis de construire, de démolir ou d’aménager initialement délivré ou contre la décision de non-opposition à déclaration préalable initialement obtenue et que ce permis modificatif, cette décision modificative ou cette mesure de régularisation ont été communiqués aux parties à cette instance, la légalité de cet acte ne peut être contestée par les parties que dans le cadre de cette même instance ».

La première précision concerne l’entrée en vigueur de cette disposition : « en l’absence de disposition expresse y faisant obstacle, ces dispositions, qui conduisent à donner compétence au juge d’appel pour statuer sur une décision modificative ou une mesure de régularisation si celle-ci est communiquée au cours de l’instance relative à l’autorisation délivrée initialement, sont applicables aux instances en cours à la date de leur entrée en vigueur ».

La seconde précision tient dans les conséquences à tirer de la compétence du Juge d’appel pour statuer sur cette mesure de régularisation. Le bénéficiaire ou l’auteur de cette mesure devra la communiquer spontanément. Les tiers, eux, auront en principe saisi le Tribunal administratif territorialement compétent : il appartiendra donc à ce dernier en application des articles R. 351-3 ou R. 345-2 du Code de justice administrative, de transmettre ce recours à la Cour administrative d’appel saisie de l’appel contre le permis initial. L’on retrouve l’idée sous jacente d’éviter les recours en cascade à l’encontre d’un même projet.

Le deuxième apport de la décision commentée porte sur l’office du Juge d’appel saisi d’un jugement prononçant l’annulation partielle d’un permis de construire alors qu’est intervenue, à la suite de ce jugement, une mesure de régularisation en application de l’article L. 600-5 du Code de l’urbanisme.

Pour le Conseil d’Etat, « il appartient alors au juge d’appel de se prononcer, dans un premier temps, sur la légalité du permis initial tel qu’attaqué devant le tribunal administratif. S’il estime qu’aucun des moyens dirigés contre ce permis, soulevés en première instance ou directement devant lui, n’est fondé, le juge d’appel doit annuler le jugement, rejeter la demande d’annulation dirigée contre le permis et, s’il est saisi de conclusions en ce sens, statuer également sur la légalité de la mesure de régularisation. Si au contraire, il estime fondés un ou plusieurs des moyens dirigés contre le permis initial mais que les vices affectant ce permis ne sont pas régularisables, le juge d’appel doit annuler le jugement en tant qu’il ne prononce qu’une annulation partielle du permis et annuler ce permis dans son ensemble, alors même qu’une mesure de régularisation est intervenue postérieurement au jugement de première instance, cette dernière ne pouvant alors, eu égard aux vices affectant le permis initial, avoir pour effet de le régulariser. Il doit par suite également annuler cette mesure de régularisation par voie de conséquence ».

Enfin, « dans les autres cas, c’est à dire lorsque le juge d’appel estime que le permis initialement attaqué est affecté d’un ou plusieurs vices régularisables, il statue ensuite sur la légalité de ce permis en prenant en compte les mesures prises le cas échéant en vue de régulariser ces vices, en se prononçant sur leur légalité si elle est contestée. Au terme de cet examen, s’il estime que le permis ainsi modifié est régularisé, le juge rejette les conclusions dirigées contre la mesure de régularisation. S’il constate que le permis ainsi modifié est toujours affecté d’un vice, il peut faire application des dispositions de l’article L. 600-5 ou de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme pour permettre sa régularisation ».

Pour être complet, on indiquera que la décision est également fichée sur un troisième point, relatif aux éléments à vérifier par le service instructeur. Pour la Haute assemblée, « l‘autorité administrative saisie d’une demande de permis de construire peut relever les inexactitudes entachant les éléments du dossier de demande relatifs au terrain d’assiette du projet, notamment sa surface ou l’emplacement de ses limites séparatives, et, de façon plus générale, relatifs à l’environnement du projet de construction, pour apprécier si ce dernier respecte les règles d’urbanisme qui s’imposent à lui. En revanche, le permis de construire n’ayant d’autre objet que d’autoriser la construction conforme aux plans et indications fournis par le pétitionnaire, elle n’a à vérifier ni l’exactitude des déclarations du demandeur relatives à la consistance du projet à moins qu’elles ne soient contredites par les autres éléments du dossier joint à la demande tels que limitativement définis par les dispositions des articles R. 431-4 et suivants du code de l’urbanisme, ni l’intention du demandeur de les respecter, sauf en présence d’éléments établissant l’existence d’une fraude à la date à laquelle l’administration se prononce sur la demande d’autorisation ».

En d’autres termes, la Commune ne peut se fonder, pour refuser une autorisation, sur l’absence de pièces ou informations qui ne sont pas au nombre de celles limitativement énumérées par les dispositions précitées de l’article R. 431-4 du code de l’urbanisme. Il lui appartiendra, en cas de doute, de d’assurer, une fois la DAACT transmise, de la conformité des travaux au permis de construire et, le cas échéant, de mettre en demeure le maître de l’ouvrage de régulariser les travaux réalisés, en conformité avec l’autorisation accordée, en application des articles R. 462-6 et R. 462-9 du code de l’urbanisme

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